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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 189

Le mardi 9 avril 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mardi 9 avril 2024

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L’éclipse solaire

L’honorable Paul J. Prosper : Honorables sénateurs, comme dans toutes les cultures autochtones, les enseignements des Mi’kmaqs sont traditionnellement transmis oralement. Inspiré en partie par la série de récits du sénateur Manning, j’ai décidé de présenter de temps à autre quelques histoires et enseignements. Le fait que ces histoires soient consignées dans le hansard contribuera à les préserver pour les générations mi’kmaques à venir et pour la population canadienne dans son ensemble. J’aimerais appeler cette série « Nta’tukwaqnminal » ou « Nos histoires ».

Au lendemain de l’éclipse solaire d’hier, de nombreuses cultures autochtones ont leur propre version de la lumière et de l’obscurité. L’obscurité est simplement l’absence de lumière.

Henry Knockwood, un aîné de Sipekne’katik, a parlé d’un kinap nommé Saul Piel Sagamaw, qui est en fait le chef Peter Paul. Un kinap est une personne dotée d’habiletés et de capacités extraordinaires.

Un jour, le chef a été confronté à un énorme défi à cause de l’arrivée d’un puoin dans sa communauté. Un puoin possède des pouvoirs surnaturels pouvant être utilisés à de bonnes ou de mauvaises fins. Le puoin se sert de ses pouvoirs surnaturels pour créer beaucoup de perturbation et de division dans la communauté.

Se sentant démuni, le kinap a prié pour demander de l’aide. Ses prières ont été entendues puisque le plamu, ou saumon, est arrivé. La hausse sans précédent des eaux dans la baie de Fundy a marqué le début d’un combat épique entre l’énergie de la lumière du plamu et l’énergie sombre du serpent de mer. Au cours de ce long combat, qui s’est terminé par la victoire de plamu sur le serpent de mer, les eaux sont devenues troubles.

Lorsque Gisult, le Grand Esprit, a créé le soleil, l’énergie sombre, ou énergie de l’ombre, n’a jamais été prévue ou requise. Le soleil, ou l’énergie de la lumière, n’est pas touché par son ombre. Bien que la perception de l’ombre change en fonction de la position de la personne qui en fait l’objet, elle ne gêne jamais l’énergie pleine de lumière. Bien que l’énergie sombre ou de l’ombre puisse sembler réelle dans un parcours lumineux, il s’agit essentiellement d’un élément absent de notre vie.

Wela’lioq. Merci beaucoup.

[Français]

Maude Cyr-Deschênes

L’honorable Percy Mockler : C’était incroyable et vrai.

Honorables sénatrices et sénateurs, je veux aujourd’hui dans cette Chambre féliciter Maude Cyr-Deschênes, qui a remporté la 10e finale de la populaire émission La Voix, dimanche dernier, à Montréal.

Qui est Maude Cyr-Deschênes? Membre de l’équipe de l’artiste France D’Amour, la musicienne de 24 ans originaire du Madawaska, dans le nord-ouest du Nouveau-Brunswick, a su charmer le public pour récolter cette récompense tant convoitée. Elle a été extraordinaire et spectaculaire.

Maude est une artiste bien connue dans sa région natale, puisqu’elle a participé à plusieurs projets artistiques, dont le spectacle L’Acadie des terres et forêts, entre 2002 et 2018.

France D’Amour a dit de Maude qu’elle était une « artiste en train d’arriver » et a salué sa présence sur scène. Je me permettrais d’ajouter qu’elle est en train d’arriver et qu’elle n’est pas près de s’arrêter.

Maude a été très présente et très disciplinée tout au long de la saison en nous montrant ses talents musicaux. De plus, toujours selon France D’Amour, sa coach, Maude inspire la force et la confiance.

Honorables sénatrices et sénateurs, je me permets de faire un clin d’œil à ses parents que je connais très bien, Étienne Deschênes et Sylvie Cyr, qui ont toujours été présents pour leur famille et qui ont contribué et continuent de contribuer au développement de la culture à tous les niveaux, que ce soit culturel, économique, éducatif ou social, partout au Nouveau-Brunswick.

Maude, tu es une fierté du Madawaska et de notre province, ainsi que du peuple de l’Acadie tout entière.

Félicitations pour ton parcours. Il ne fait aucun doute que ta persévérance, ton talent et l’appui de ta famille, de tes amis et de ta communauté ont été des éléments très importants de ton succès.

Bonne chance dans tes projets futurs. Nous continuerons de te suivre et de surveiller la longue carrière qui se dessine devant toi.

Félicitations, Maude; chapeau levé. C’est vrai, tu es exceptionnelle et extraordinaire!

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le Nunavut

L’honorable Pat Duncan : Honorables sénateurs, le 1er avril 1999, les Territoires du Nord-Ouest ont été officiellement divisés en deux pour créer le Nunavut. Ce jour-là, le leader du gouvernement à l’Assemblée législative du Yukon, Piers McDonald, a déclaré ce qui suit :

Le mot Nunavut signifie « notre terre » en inuktitut. Le territoire qu’il désigne représente un cinquième de la masse terrestre totale du Canada. Il couvre trois fuseaux horaires et s’étend des îles de l’extrême-arctique au nord à l’île de Baffin à l’est et aux rives de la baie d’Hudson au sud.

Avec ses deux millions de kilomètres carrés, la superficie totale du Nunavut est supérieure à celle de toute province canadienne et grandement supérieure à celle de nombreux pays.

La géographie du Nunavut a contribué à créer un objectif commun chez le peuple inuit, et la création de ce nouveau territoire témoigne de tout ce que les membres d’une communauté unie peuvent accomplir ensemble.

Honorables sénateurs, à l’occasion du 25e anniversaire du Nunavut, je me permets de nous rappeler le rôle que nous avons joué dans sa création. À l’instar du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut a été créé par une loi du Parlement. Le territoire est représenté par un député à l’autre endroit et par un sénateur au Sénat. Au Sénat, nous avons hâte que le prochain sénateur du Nunavut soit nommé.

Honorables sénateurs, vous m’avez entendu dire à maintes reprises que le Parlement du Canada est l’unique responsable des territoires, étant donné qu’ils ne sont pas inscrits dans la Loi constitutionnelle. Leurs constitutions avec un « c » minuscule sont des lois du Parlement qui peuvent être modifiées dans le cadre du processus législatif habituel, ce qui inclut le Sénat, sans invoquer de formule de modification.

Notre ami et ancien collègue Dennis Patterson a travaillé sans relâche en tant que membre du Conseil des Territoires du Nord‑Ouest pour que le Nunavut obtienne le statut de territoire et pour poursuivre le processus long et complexe de transfert des responsabilités. Dans son discours inaugural au Sénat, 10 ans après la création du Nunavut, il a parlé de la nécessité d’achever le processus pour que le Nunavut soit maître de son destin et qu’il décide de son développement et de sa gouvernance, à savoir qu’il prenne concrètement son avenir en main à l’échelle locale par l’intermédiaire de son gouvernement consensuel dûment élu.

(1410)

Dans son discours, Dennis Patterson a exhorté le gouvernement de l’époque à respecter les Inuits et leur gouvernement élu et à conclure une entente sur le transfert des responsabilités, comme il l’avait fait en 2003 avec le Yukon et plus tard, en 2014, avec les Territoires du Nord-Ouest. Voici un extrait de ce qu’il a dit :

La population du Nunavut ne veut plus que le gouvernement fédéral, aussi bien intentionné qu’il soit, prenne des décisions essentielles concernant la gestion des terres et des ressources du territoire. Nous méritons d’exercer les mêmes pouvoirs que les Canadiens du Sud à l’égard de nos ressources naturelles importantes. Les Inuits du Nunavut ont acquis, grâce au règlement de leurs revendications territoriales, le droit protégé par la Constitution de participer à une mise en valeur responsable de leurs ressources.

Je rappelle aux honorables sénateurs que la prochaine étape du développement du Nunavut et de l’évolution de notre travail constitutionnel en tant que Canadiens consistera à examiner les modifications à la Loi sur le Nunavut et à faire avancer l’évolution constitutionnelle de notre pays, ce qui donnera véritablement vie et sens à l’entente sur le transfert des responsabilités respectueuse de la volonté des Inuits du Nunavut.

Merci. Gùnáłchîsh. Mahsi’cho. Matna.

Des voix : Bravo!

La professeure Lena Dominelli

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je prends la parole aujourd’hui, en territoire algonquin anishinabe, pour souligner le Mois national du travail social, qui était en mars. Chaque mois de mars, nous profitons de l’occasion pour reconnaître publiquement le travail important que les quelque 50 000 travailleurs sociaux du Canada font chaque jour pour nos collectivités.

Aujourd’hui, j’aimerais souligner le travail d’une travailleuse sociale en particulier : Lena Dominelli. Elle est reconnue partout dans le monde et a apporté d’importantes contributions au cours des 30 dernières années. De travailleuse sociale féministe et antiraciste à la fin des années 1980 à sa pratique innovatrice actuelle dans le domaine du travail social vert et de la planification des catastrophes, son influence s’étend partout dans le monde.

Madame Dominelli est une auteure prolifique et est titulaire de la chaire en travail social de l’Université de Stirling, en Écosse. Elle est Canadienne et membre active de l’association des travailleurs sociaux de Colombie-Britannique, mais elle vit et travaille en Écosse.

Madame Dominelli et moi avons aussi des liens personnels. Nous nous sommes rencontrées pour la première fois en 1991, alors qu’elle rendait visite à une autre universitaire féministe à Halifax. Deux ans plus tard, je suis entrée à l’Université de Sheffield, en Angleterre, en tant que première doctorante à étudier dans deux établissements à la fois. Mme Dominelli s’est portée volontaire pour être ma directrice de thèse de doctorat. Je peux encore l’entendre me dire « Je ne sais pas grand-chose au sujet de la résilience des hommes noirs, mais je crois en toi! »

Elle a cru en moi quand je n’avais pas foi en moi. Elle m’a inspirée à devenir la meilleure chercheuse en travail social que je pouvais être. Elle m’a appris à utiliser les outils du maître pour abattre tous les obstacles, à accéder à la maison du maître et à avancer sur la voie du succès. Elle m’a inspirée à devenir une force de changement positif à titre de travailleuse sociale. Elle continue d’être une source d’inspiration pour ses étudiants et pour moi.

Pas plus tard que le mois dernier, en collaboration avec l’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux, nous avons organisé un événement en ligne où les participants étaient appelés à discuter du travail social vert, de la planification en cas de catastrophe et de la sensibilisation des travailleurs sociaux à ce volet essentiel.

Aujourd’hui, j’ai le privilège de remercier publiquement la professeure Lena Dominelli pour ses nombreuses contributions au travail social au cours des trois dernières décennies. En terminant, malgré un léger retard, je tiens à souhaiter un joyeux Mois national du travail social à tous les travailleurs sociaux au Canada.

Asante. Je vous remercie.

L’Aïd el-Fitr

L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom des sénateurs Ataullahjan, Gerba, Yussuff, Jaffer et Al Zaibak pour souligner une occasion qui nous rappelle le fondement de la compassion, de l’unité et de la gratitude. Demain soir, nous célébrerons l’Aïd el-Fitr, le festival qui marque la fin du jeûne, afin de célébrer la fin du mois saint du ramadan, une période sacrée de jeûne, de bienveillance et de réflexion spirituelle pour les musulmans du monde entier.

Face à l’augmentation de la polarisation dans le monde, il est essentiel de réfléchir aux valeurs qui nous unissent sur le plan humain. L’Aïd el-Fitr est une lueur d’espoir qui nous rappelle le pouvoir de la résilience, de la foi et de la communauté. C’est un moment où les familles et les communautés se rassemblent, indépendamment de leurs origines ou de leurs croyances, pour célébrer les bienfaits de la vie, la force de la diversité et l’importance de tendre une main bienveillante à ceux qui sont dans le besoin.

Ces célébrations sont souvent l’occasion pour les familles et les communautés de se réunir autour d’un repas festif. Les gens profitent de l’occasion pour se rapprocher de leurs anciens et nouveaux amis, créant ainsi des moments et des souvenirs spéciaux à partager. Pour de nombreux enfants, l’Aïd el-Fitr s’accompagne de friandises et de cadeaux à partager, ou pas, avec leurs frères et sœurs, et d’activités amusantes qui leur permettent de renouer avec leurs racines culturelles et leur communauté locale.

La fin de semaine dernière, j’ai eu le privilège de passer du temps avec mes sœurs Aisha et Nuru à Aurora. Nous avons réfléchi à la chance que nous avons de faire partie de ce merveilleux pays et au respect que nous portons à cette nation pluraliste.

Alors que nous naviguons à travers les complexités de notre monde moderne, il est impératif que nous nous inspirions des valeurs défendues durant cette période, à savoir la paix, la compassion et la compréhension. Lorsqu’il y a des conflits et des divisions, réaffirmons notre engagement à favoriser le dialogue, la coopération et le respect mutuel et ne permettons pas que les fondements de nos croyances soient affaiblis par des opinions fondamentalistes et extrémistes.

Au nom de tous ceux qui sont présents ici aujourd’hui, j’adresse mes vœux chaleureux à l’ensemble de la communauté musulmane en cette joyeuse occasion. Puisse l’Aïd nous rappeler notre humanité commune et notre responsabilité collective de lutter pour un monde où règnent la paix et l’harmonie.

Merci. Meegwetch.

L’organisation Million Peacemakers

L’honorable Tony Loffreda : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner le travail d’une organisation remarquable, Million Peacemakers. Cofondée par le Canadien Stephen Hecht, coauteur du succès de librairie Nonflict: the Art of Everyday Peacemaking, cette organisation a de grands objectifs pour aider à façonner un avenir meilleur. Par son essence même, le principe du « nonflit » vise à transformer tout conflit en une situation de non-conflit et à donner à chacun la capacité de favoriser la réconciliation, la compréhension mutuelle et la paix dans les milieux de travail, à l’école, à la maison et dans nos collectivités.

Tout d’abord, Million Peacemakers souhaite former 1 million d’artisans de la paix à la méthode « nonflit », qui a fait ses preuves pour le rétablissement de la paix au quotidien.

Deuxièmement, l’organisation souhaite créer au Rwanda un institut de la paix axé sur la recherche et l’éducation, avec un intérêt particulier pour la résolution de conflits, la paix et la prévention des génocides. Elle a déjà signé un protocole d’entente avec le gouvernement du Rwanda.

Troisièmement, Million Peacemakers souhaite élaborer et lancer une expérience d’apprentissage en ligne de calibre mondial pour que tout le monde puisse avoir accès au pouvoir du « nonflit » et en bénéficier. Grâce à des ateliers, l’organisation espère fournir à toute personne intéressée — des jeunes et des écoles jusqu’aux dirigeants d’entreprise et aux familles — les outils nécessaires pour maintenir la paix au quotidien d’une manière significative et efficace. Les participants apprendront à communiquer efficacement, à engager une discussion saine et positive et à faire preuve d’empathie — un élément crucial — dans toute situation de résolution de conflit.

Aucun conflit n’est trop petit pour bénéficier de la méthode « nonflit ».

J’ai rencontré récemment le directeur général du groupe, Jon Moyal, et le directeur Mark Sadovnick, afin d’en apprendre davantage sur cette approche novatrice, qui n’a jamais été aussi nécessaire. J’ai été frappé par l’effet que l’approche du « nonflit » peut avoir sur un milieu de travail. Selon une analyse récente, 85 % des personnes vivent des conflits au travail et une personne sur quatre s’absentera du travail pour éviter un conflit. Au Canada, les conflits en milieu de travail coûtent aux entreprises plus de 2 milliards de dollars par an, ce qui peut nuire à la productivité.

La formation sur le « nonflit » permet de réduire les coûts liés à ces conflits dévastateurs, car elle peut aider n’importe quelle équipe à accroître sa cohésion, à stimuler sa productivité, à renforcer le leadership et à améliorer l’engagement des employés — pour ne mentionner que ces avantages. L’engagement des employés est essentiel à l’obtention de résultats et à l’autonomisation des gens qui travaillent pour nous. Il s’agit d’un modèle formidable et éprouvé, qui donne des résultats tangibles. Il mérite d’être considéré par n’importe quel gestionnaire.

Honorables sénateurs, je vous encourage à vous renseigner au sujet du mouvement Million Peacemakers, et j’invite tous les Canadiens à adopter les principes liés à l’approche du « nonflit » afin de cultiver de meilleures relations au travail et à la maison.

(1420)


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le Sénat

Document d’accompagnement du Règlement du Sénat du Canada—Dépôt de la troisième édition

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Document d’accompagnement du Règlement du Sénat du Canada, Troisième édition, 2024, préparé par le greffier du Sénat.

[Traduction]

Des copies électroniques seront bientôt disponibles en ligne.

La justice

L’Énoncé concernant la Charte en ce qui a trait au projet de loi S-17—Dépôt de document

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un énoncé concernant la Charte préparé par le ministre de la Justice ayant trait au projet de loi S-17, Loi visant à corriger des anomalies, contradictions, archaïsmes ou erreurs relevées dans les lois et règlements du Canada et à y apporter d’autres modifications mineures et non controversables ainsi qu’à abroger certaines dispositions ayant cessé d’avoir effet, conformément à la Loi sur le ministère de la Justice, L.R.C. 1985, ch. J-2, par. 4.2(1).


PÉRIODE DES QUESTIONS

L’environnement et le changement climatique

La taxe sur le carbone

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Sénateur Gold, quelques jours avant qu’il n’augmente la taxe sur le carbone de 23 %, un journaliste a demandé au premier ministre Trudeau s’il était prêt à s’asseoir avec les premiers ministres qui ont exprimé des préoccupations légitimes à ce sujet.

Le premier ministre a réagi en traitant les premiers ministres de menteurs. Comme ils ne sont pas d’accord avec lui, il les traite de menteurs.

Fait amusant, après qu’il a accusé les premiers ministres provinciaux, je n’ai pas entendu un seul libéral condamner le premier ministre pour ses propos. Pourtant, l’année dernière, lorsque j’ai traité le premier ministre Trudeau de menteur, je me suis fait rappeler à l’ordre.

Pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures, monsieur le leader?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Il n’y a pas deux poids, deux mesures. Malheureusement, certains politiciens de notre pays ne cessent d’induire les Canadiens en erreur en ce qui concerne les incidences de la tarification de la pollution sur le coût de la vie et sur le coût du logement.

J’utilise ces mots sciemment : ils induisent les Canadiens en erreur, et ils font cela en toute connaissance de cause. Point final.

En ce qui concerne le préambule de votre question, le premier ministre a clairement indiqué qu’il accueillait favorablement — et je l’ai d’ailleurs clairement dit dans cette enceinte — les suggestions constructives des premiers ministres qui ont la possibilité, s’ils le souhaitent, de mettre en place des programmes sur mesure pour réduire les émissions dans leur province, dans l’intérêt de la planète et de leurs concitoyens.

Le sénateur Plett : Il les a traités de menteurs. Si Susan Delacourt peut écrire dans une publication libérale comme le Toronto Star qu’il a traité les premiers ministres provinciaux de menteurs, alors je peux en faire autant.

Pour être plus précis, il a accusé les premiers ministres conservateurs de mentir aux Canadiens, et il n’y a pas eu de conséquences ni de réprimandes. Le premier ministre a-t-il oublié que le premier ministre Furey est un libéral? A-t-il oublié que les partis libéraux de la Nouvelle‑Écosse, du Nouveau‑Brunswick et de l’Ontario s’opposent également à sa taxe sur le carbone, ou croit-il que ce sont tous des menteurs?

Le sénateur Gold : Le gouvernement et le premier ministre du Canada disent clairement depuis des années que la tarification de la pollution est la mesure qui est la mieux adaptée au marché et la plus efficace pour lutter contre la pollution. Par ailleurs, des tiers indépendants ont confirmé que les répercussions sur le coût de la vie sont négligeables. Encore une fois, je maintiens la réponse que j’ai donnée plus tôt.

Les finances

Le budget de 2024

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, le budget sera présenté dans une semaine, bien que nous ayons déjà vu une grande partie de son contenu, puisque le premier ministre a lancé une série de séances de photos, ce qui semble lui plaire.

Je pense que ce qui intéressera les Canadiens, c’est ce qui ne figure pas dans le budget, à savoir un plan tangible et crédible pour aider les Canadiens ordinaires qui se débattent sous le poids de la mauvaise gestion financière du gouvernement. Pierre Poilievre a envoyé une lettre à votre patron, Justin Trudeau, pour définir trois solutions simples qui non seulement aideraient les Canadiens, mais lui vaudraient le soutien de M. Poilievre pour le budget, et Dieu sait que le gouvernement a besoin d’un soutien crédible. Il s’agit, premièrement, d’abolir la taxe pour les agriculteurs et les denrées alimentaires, deuxièmement, de construire des logements au lieu d’alourdir la bureaucratie, et troisièmement, de plafonner les dépenses avec une règle d’un dollar pour un dollar afin de faire baisser les taux d’intérêt et l’inflation. Le gouvernement s’engagera-t-il à prendre ces trois mesures pour redresser ce qui, autrement, ne sera qu’un autre budget libéral truffé de promesses, mais dépourvu de résultats concrets?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Non. La réponse est non. Tout d’abord, le gouvernement en fait beaucoup pour aider les Canadiens, et ce depuis un certain temps. Les annonces auxquelles vous avez fait référence sont d’autres exemples de mesures ciblées, pratiques, réalistes et prudentes visant à aider les Canadiens dans le domaine du logement et dans d’autres domaines où le coût de la vie continue à poser des problèmes, en particulier pour les jeunes. Je ne répéterai pas, parce que c’est devenu vraiment fastidieux, que le gouvernement reste attaché à la tarification de la pollution et, à l’égard de votre troisième élément, à des investissements prudents et pratiques dans l’intérêt des Canadiens d’aujourd’hui et des générations futures.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, voici un autre exemple qui illustre à quel point la situation s’est détériorée au cours des huit dernières années sous la direction de Justin Trudeau. Avant qu’il soit élu, un foyer canadien qui gagnait le revenu médian pouvait se payer une maison moyenne en y consacrant 39 % de sa paie. Selon la RBC, ce pourcentage a maintenant bondi pour atteindre 64 %.

Sénateur Gold, pourquoi le gouvernement refuse-t-il d’enfin prendre des mesures concrètes, c’est-à-dire d’abolir la taxe, de construire des logements et de limiter les dépenses?

Le sénateur Gold : Il devient difficile de résister à l’envie de vous répondre en vous rendant la pareille, monsieur le sénateur. Depuis 2015, le gouvernement a aidé plus de 2 millions de Canadiens à trouver le logement dont ils avaient besoin. Depuis septembre seulement, un train de mesures a facilité la construction de plus de 1,2 million de logements. Passons aux statistiques du gouvernement précédent, lorsque le chef conservateur s’autoproclamait le ministre du Logement. Combien de logements coopératifs ont été construits? Zéro. Combien d’appartements ont été construits pour les familles de la classe moyenne? Zéro. Qu’en est-il des logements abordables? Un total impressionnant de six.

Les affaires mondiales

Le conflit entre Israël et le Hamas

L’honorable Yuen Pau Woo : Sénateur Gold, que fait le gouvernement pour évaluer s’il y a eu des violations du droit humanitaire international dans le conflit qui se poursuit entre le Hamas et Israël, y compris de possibles de crimes de guerre?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement demeure extrêmement préoccupé par les événements qui se produisent dans la bande de Gaza. Il communique fréquemment avec nos alliés démocratiques, dont Israël et le Groupe des cinq. Comme il l’a mentionné sans équivoque, le gouvernement appuie également les démarches internationales visant le respect du droit humanitaire par toutes les parties au conflit.

Le sénateur Woo : Sénateur Gold, le conflit se poursuit, et il y a de nombreuses allégations crédibles de violations du droit humanitaire international. J’ose croire que le gouvernement effectue sa propre analyse. Rendra-t-il cette analyse accessible aux Canadiens, et envisagera-t-il également d’employer l’ensemble des sanctions autonomes à sa disposition en réponse à ces violations?

Le sénateur Gold : Des allégations ont effectivement été formulées. Pour le moment, ni moi ni le gouvernement ne sommes en mesure d’évaluer la crédibilité de ces allégations. Cela dit, le gouvernement continue de surveiller attentivement la situation et prendra toutes les mesures appropriées dans le contexte de cette tragique situation qui perdure.

(1430)

La santé

La réglementation des liquides à vapoter

L’honorable Donna Dasko : Ma question s’adresse au sénateur Gold. Il s’agit d’une question qui a déjà été posée, mais il convient certainement de la poser de nouveau.

Le vapotage est moins dommageable que le tabagisme, mais il n’est pas sans danger et toute une nouvelle génération est en train de devenir dépendante de la nicotine. Selon les experts, le taux de vapotage chez les jeunes au Canada compte parmi les plus élevés de la planète.

En juin 2021, Santé Canada a proposé une réglementation pour interdire l’ajout de saveurs — à l’exception de la menthe et du menthol — au liquide des cigarettes électroniques. Trois années plus tard, Ottawa n’a toujours pas mis en place cette réglementation. Quinze organisations canadiennes du secteur de la santé — dont la Fondation des maladies du cœur du Canada et la Société canadienne du cancer — et de nombreuses organisations internationales demandent toutes qu’on aille plus loin : il faut interdire toutes les saveurs, y compris la menthe et le menthol, à l’exception de la saveur de tabac.

Quand le gouvernement fédéral instaurera-t-il l’interdiction proposée, d’autant plus que le milieu de la santé réclame maintenant des mesures encore plus musclées? Merci.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question. Le gouvernement entend toujours aider les Canadiens à arrêter de consommer des produits du tabac et protéger leur santé, qu’ils soient jeunes ou moins jeunes. Le gouvernement continuera d’imposer des restrictions à la publicité et il étudie présentement les propositions visant à limiter les produits de vapotage dont vous avez parlé, notamment en ce qui a trait aux saveurs, à la teneur en nicotine et à la disponibilité en ligne.

Vous le savez, des consultations ont eu lieu au sujet de ces propositions et elles se sont terminées en 2021. Le gouvernement a reçu 25 000 mémoires. Comme ce processus a eu lieu il y a quelques années, le gouvernement a communiqué récemment avec les parties intéressées afin d’obtenir leur avis et de mettre leurs informations à jour. On m’a informé que le gouvernement aurait du nouveau à nous présenter dans les mois à venir.

La sénatrice Dasko : Le gouvernement envisagera-t-il d’ajouter la menthe et le menthol à la liste des arômes interdits dans le règlement proposé? Merci.

Le sénateur Gold : Cette question fait partie de celles que le gouvernement étudie actuellement, et il demande conseil à des intervenants à ce sujet. Certaines provinces, dont la mienne, l’ont déjà fait. Le gouvernement étudie sérieusement toutes les mesures visant à réduire l’attrait du vapotage pour éviter qu’il devienne une porte d’entrée vers le tabagisme.

La santé

Le financement des soins de santé primaires

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler : Ma question s’adresse au sénateur Gold. Selon une enquête publiée récemment par le Fonds du Commonwealth, le Canada se classe au dernier rang de 10 pays à revenu élevé pour ce qui est de l’accès à un médecin de famille. Il s’agit notamment des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et d’autres pays comparables. La moyenne des 10 pays est de 93 %. La proportion d’adultes canadiens ayant accès à un fournisseur de soins primaires est passée de 93 % en 2016 à 86 % en 2023. Les accords bilatéraux sur la santé conclus récemment comprennent un engagement à respecter le principe de l’accessibilité des soins de santé énoncé dans la Loi canadienne sur la santé.

Sénateur Gold, cette enquête et d’autres données montrent que les Canadiens ont de moins en moins accès à des fournisseurs de soins primaires. Comment le gouvernement fédéral tiendra-t-il les provinces et les territoires responsables si les Canadiens continuent d’être privés de fournisseurs de soins primaires?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question et de souligner une situation qui touche de nombreux ménages et de nombreuses personnes partout au pays.

Au moyen du programme Entrée express, le gouvernement a mis en place des mesures pour faciliter le traitement des demandes de résidence permanente de médecins étrangers, mais ce n’est qu’un des aspects relevant de la compétence fédérale pour remédier à cette situation. Le gouvernement a également annoncé une enveloppe de 86 millions de dollars pour accélérer la reconnaissance des titres de compétence étrangers. L’objectif est d’accueillir plus de 6 000 nouveaux professionnels de la santé diplômés à l’étranger dans le système de santé de notre pays afin de servir les Canadiens partout au pays.

Lors de la réunion des ministres de la Santé en octobre 2023, les provinces et les territoires se sont engagés — en collaboration avec le gouvernement fédéral, bien sûr — à augmenter le nombre de places dans les programmes de formation des médecins et du personnel infirmier, y compris les infirmières praticiennes. De son côté, le gouvernement du Canada continuera de soutenir les provinces et les territoires dans ce dossier — par l’entremise de son financement et de son rôle fédérateur.

La sénatrice Osler : Dans sa lettre de mandat de 2021, le ministre de la Santé de l’époque a reçu le mandat d’améliorer la conformité à la Loi canadienne sur la santé et d’en moderniser l’interprétation, plus précisément en ce qui concerne la surfacturation des services assurés par le régime public.

Sénateur Gold, pouvez-vous nous fournir des détails sur la façon dont on a amélioré la conformité à la Loi canadienne sur la santé et modernisé son interprétation?

Le sénateur Gold : Comme vous le savez, l’objectif de la Loi canadienne sur la santé et des déductions obligatoires du Transfert canadien en matière de santé a toujours été de veiller à ce que les patients n’aient pas à payer de leur poche pour des services médicaux nécessaires. Comme vous le savez et comme je l’ai annoncé, il y a maintenant des ententes bilatérales avec l’ensemble des provinces et des territoires. Dans le cadre de ces ententes, le gouvernement fédéral collabore avec les provinces et les territoires afin d’améliorer l’accès aux services de santé et de moderniser notre système pour les Canadiens, et il poursuivra ses efforts dans les dossiers que vous avez mentionnés.

Le patrimoine canadien

Le soutien apporté aux médias

L’honorable Andrew Cardozo : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Je suis ravi de vous dire que la sénatrice Cordy, le sénateur Yussuff, le sénateur Loffreda et moi-même avons organisé hier une table ronde sur la crise des médias d’information. Il y a eu de nombreuses mises à pied et transactions de vente, que l’on pense à Bell, CTV, CBC/Radio‑Canada, SaltWire ou Whitehorse Star, plus récemment. De nombreuses suggestions constructives ont été présentées. Des mesures fédérales comme un modèle sans but lucratif pour les organisations journalistiques enregistrées — comme celui que La Presse a utilisé — ont récolté un vaste appui.

Le gouvernement est-il d’accord pour dire que les médias d’information sont confrontés à une crise? Prolongerez-vous le crédit d’impôt pour abonnement aux nouvelles numériques à l’intention des consommateurs, qui doit prendre fin en 2025?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Le gouvernement du Canada soutient une industrie journalistique forte, et je suis certain que c’est aussi le cas de l’ensemble des gouvernements et des citoyens. C’est un pilier essentiel de notre démocratie.

Je ne suis pas en mesure de répondre à votre question sur la prolongation du crédit d’impôt pour abonnement aux nouvelles numériques, mais je peux vous dire que le gouvernement du Canada continuera à soutenir le journalisme local. Il a déjà pris de nombreuses mesures. Il a présenté et mis en œuvre de la Loi sur les nouvelles en ligne. Il existe également une série de programmes, comme le Fonds du Canada pour les périodiques et le crédit d’impôt pour la main-d’œuvre journalistique canadienne, qui a récemment été bonifié.

Le gouvernement demeure déterminé à soutenir une presse libre qui est viable, fiable et indépendante en cette période critique où nous recevons tous une avalanche de nouvelles provenant de sources qui sont loin d’être crédibles.

Le sénateur Cardozo : Ma question complémentaire porte sur ce que vous avez dit, à savoir qu’un journalisme fort constitue un pilier de la démocratie. Plusieurs participants de la table ronde, surtout des universitaires, ont exprimé leur crainte que le journalisme soit la cible d’attaques par certains politiciens. Ils ont établi une distinction entre les politiciens qui se livrent à des attaques ad hominem contre des journalistes et ceux qui ne font que leur exprimer leur désaccord.

Selon vous, dans quelle mesure les parlementaires doivent-ils respecter le travail des journalistes qui sont tenus de demander des comptes aux institutions publiques, de poser les questions difficiles et de renseigner le public?

Le sénateur Gold : Encore une fois, je ne prétends pas parler au nom de tous les Canadiens, mais je crois que beaucoup de gens s’entendent pour dire — et je partage certainement leur avis — qu’une presse libre, rigoureuse et vigoureuse est essentielle à la démocratie et que l’un de ses rôles consiste à demander des comptes au gouvernement.

La Société canadienne d’hypothèques et de logement

Le logement abordable

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader du gouvernement, le premier ministre s’est récemment rendu à Vancouver pour faire une annonce concernant les loyers. Il a déclaré que les jeunes Canadiens sont confrontés à la montée en flèche des loyers, aux rénovictions, à la concurrence déloyale et au manque d’options en matière de logement. Il s’agit bien sûr d’une confirmation de l’incapacité de son propre gouvernement à prendre au sérieux la question du logement et du coût élevé des loyers. En février, le coût du loyer résidentiel mensuel moyen au Canada s’élevait à 2 193 $. Il s’agit d’une augmentation de 10,5 % en un an. En fait, le coût des loyers a augmenté de 21 % en seulement deux ans, soit une moyenne de 384 $ par mois.

Monsieur le leader, pourquoi les Canadiens croiraient-ils que le gouvernement Trudeau peut construire plus de logements et résoudre cette crise alors que les loyers ont doublé sous sa gouverne?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question et d’avoir encore une fois souligné le défi très important auquel les Canadiens sont confrontés, en particulier les plus jeunes, mais pas uniquement.

Chers collègues, je répète encore une fois, avec tout le respect que je vous dois, que le gouvernement a fait plus que ses prédécesseurs, pour aider de manière tangible les Canadiens, qu’ils soient locataires ou désireux d’acheter un bien immobilier. Il faut néanmoins souligner la complexité du marché et des champs de compétences qui entoure toute tentative d’accélérer et de créer des logements pour les Canadiens.

Cet automne seulement, le gouvernement du Canada a pris des mesures qui permettront de créer plus de 600 000 nouveaux logements locatifs, dont un grand nombre se situent dans la gamme des logements abordables.

(1440)

La sénatrice Martin : Monsieur le leader, comme je l’ai dit, les loyers ont doublé sous votre gouvernement. La Société canadienne d’hypothèques et de logement, qui est une société d’État, a publié ses Perspectives du marché de l’habitation de 2024, disant :

Malgré l’augmentation du nombre de logements locatifs achevés, la demande croissante sur le marché locatif ne sera pas satisfaite. En effet, le coût de l’accès à la propriété incitera les ménages à rester locataires. Les loyers augmenteront et les taux d’inoccupation diminueront.

Monsieur le leader, si le soi-disant Fonds pour accélérer la construction de logements du gouvernement Trudeau et ses autres annonces et séances de photos fonctionnent, le coût des loyers ne devrait-il pas baisser au lieu de continuer à augmenter?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.

En tout respect, le coût du logement dépend de nombreuses forces du marché, en plus des initiatives prises par le gouvernement pour augmenter l’offre. Il s’agit clairement d’une question plus compliquée que la simple question binaire de savoir qui occupe le bureau du premier ministre à un moment donné.

[Français]

La défense nationale

Les Forces armées canadiennes

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, il y a près d’un siècle, il était déjà prévu qu’il y aurait une éclipse complète sur la région hier. Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de faire son annonce sur les forces armées et sur son investissement de 8 milliards de dollars sur cinq ans le même jour qu’une éclipse solaire? Voulait-il faire une éclipse médiatique? Le gouvernement était-il gêné de son annonce et voulait-il se cacher?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour la question, et bravo pour cette tentative de lier des choses qui ne le sont pas, avec respect. Le gouvernement a fait son annonce parce qu’il prend au sérieux ses obligations et les obligations du Canada à l’égard de nos forces armées. Il prend au sérieux le défi de continuer d’approcher la cible de 2 % réclamée par l’OTAN. Il prend au sérieux le fait de continuer d’investir dans nos forces armées et de continuer de faire en sorte que le Canada puisse atteindre ses objectifs pour mieux défendre le pays.

Le sénateur Carignan : L’année dernière, le directeur parlementaire du budget disait que nous aurions besoin de 18 milliards de dollars de plus annuellement pour atteindre cette cible de 2 %. Votre gouvernement a annoncé qu’il investissait 8,1 milliards de dollars sur cinq ans. Comment voulez-vous que les gens, les militaires et nos collègues de l’OTAN nous prennent au sérieux pour ce qui est de notre volonté d’atteindre ce qui est maintenant un plancher de 2 %?

Le sénateur Gold : C’est important de faire une comparaison et c’est aussi très facile. En 2006, notre pourcentage en matière de dépenses était de 1,1 %. Avec l’annonce de cette semaine, on est tout près de 1,76 %. C’est une progression tangible et vraie et ce sont les faits.

L’emploi et le développement social

La politique nationale en matière d’alimentation dans les écoles

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Sénateur Gold, le premier ministre Trudeau a fait récemment plusieurs annonces qui touchent directement les compétences des provinces, notamment en matière de logement. Ces propositions s’ajoutent à d’autres, en santé notamment, qui ont amené le Québec à dire au gouvernement fédéral de se mêler de ses affaires. Je comprends que les citoyens se préoccupent peu du partage des compétences. Ils veulent simplement des programmes qui répondent à leurs besoins. Cependant, ces questions sont essentielles pour notre ordre constitutionnel. Elles peuvent sérieusement envenimer les relations fédérales-provinciales.

Parmi ces annonces, il y a un nouveau programme fédéral pour des repas dans les écoles dont le financement serait d’un milliard de dollars sur cinq ans. Après les cinq premières années de financement, comment ce programme continuera-t-il à fonctionner? Est-ce que cette dépense sera transférée aux provinces, qui ont une compétence exclusive en matière d’éducation, mais n’ont sans doute pas les fonds nécessaires pour prendre le relais?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour la question. L’annonce que vous avez mentionnée est très importante, parce qu’il y a près d’un enfant sur quatre au Canada qui ne mange pas à sa faim, et cela nuit à ses chances à l’école et ailleurs. Le programme que vous avez annoncé est important pour les Canadiens comme c’est aussi le cas dans de nombreux domaines, chère collègue. Le gouvernement fédéral doit travailler en étroite collaboration avec les provinces et les territoires pour résoudre les problèmes dans ce domaine en particulier, parce qu’il y a une responsabilité partagée, surtout en raison du financement du côté fédéral et des compétences constitutionnelles des provinces et territoires. Je n’ai aucun doute que le gouvernement du Canada continuera de travailler avec les provinces et les territoires pour répondre aux besoins des Canadiens et faire en sorte qu’on pourra conclure des ententes pour mieux servir les jeunes qui ont besoin de nourriture.

La sénatrice Miville-Dechêne : Sachez que je n’ai aucun problème avec le programme; c’est plutôt sa pérennité qui m’inquiète.

Le premier ministre Trudeau veut également créer une charte canadienne des locataires, ce qui a fait littéralement bondir le gouvernement du Québec. On n’est même plus ici dans le financement de la construction de logements. En fait, un tel registre public a déjà été écarté par le gouvernement Legault. Est-ce vraiment le rôle constitutionnel du gouvernement central de créer une telle charte?

Le sénateur Gold : C’est une bonne question, une question légitime. Cela dépend et dépendra des détails de la charte et des conséquences pour ceux qui iront à l’encontre de ce qui s’y trouvera. Les détails ne sont pas encore connus. Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de leader. Ce n’est pas nécessairement une question de pouvoirs constitutionnels. Il faut attendre de connaître les détails au sujet de cette charte pour que je puisse mieux répondre à votre question.

[Traduction]

Les finances

La prestation canadienne pour les personnes handicapées

L’honorable Kim Pate : Sénateur Gold, face à l’incertitude et à l’instabilité économiques croissantes, les groupes de personnes en situation de handicap et les parlementaires, dont plus de 60 députés libéraux, demandent au gouvernement de financer la prestation canadienne pour les personnes handicapées dans le budget de 2024.

Lorsque nous avons étudié la prestation canadienne pour les personnes handicapées, la ministre de la Diversité, de l’Inclusion et des Personnes en situation de handicap a promis aux sénateurs que la prestation serait en vigueur pour soutenir les personnes dans le besoin d’ici la fin de 2024. Dans le budget de mardi prochain, le gouvernement honorera-t-il cet engagement envers les personnes handicapées — dont un trop grand nombre attendent depuis trop longtemps et continuent de dépérir alors qu’elles vivent dans la pauvreté — en finançant la prestation canadienne pour les personnes handicapées?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Il y a longtemps que nous avons adopté cette mesure législative historique.

Sur cette question en particulier, je ne suis pas en mesure d’annoncer ce qu’il y aura dans le budget, mais, heureusement, cela deviendra très clair dès la semaine prochaine.

Je vous remercie de votre question.

La sénatrice Pate : Si le gouvernement n’agit pas dans le budget de 2024, quelles mesures concrètes prendra-t-il pour respecter son engagement visant à instaurer la prestation canadienne pour les personnes handicapées d’ici la fin de 2024?

Le sénateur Gold : Merci. Comme je l’ai dit, je ne tiens pas à m’avancer sur ce qui pourrait se trouver — ou pas — dans le budget, car je ne suis pas en mesure de m’exprimer sur ce sujet.

Le gouvernement a toujours été déterminé à bien faire les choses en consultation avec les personnes handicapées et il poursuivra sur cette lancée. Il s’agit d’une priorité importante pour le gouvernement, et j’ai confiance qu’il respectera sa promesse.

Les pêches et les océans

Les pêches fondées sur les droits

L’honorable Paul J. Prosper : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, la semaine dernière, deux jeunes Mi’kmaqs ont été détenus de façon inhumaine par des agents de Pêches et Océans Canada. Les jeunes exerçaient leurs droits ancestraux issus de traités de pêcher sur le territoire mi’kmaq, et deux agents de Pêches et Océans ont pris leurs téléphones et leurs chaussures, les forçant à marcher une certaine distance en ne portant que des chaussettes. Aucun Canadien ne mérite un tel traitement et aucun Canadien n’accepterait que ses enfants soient traités de la sorte. Cela ne peut pas être balayé sous le tapis.

Sénateur Gold, comment Pêches et Océans Canada réagit-il à ces graves allégations de harcèlement et, à vrai dire, d’abus de pouvoir?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question.

Le gouvernement prend cette affaire très au sérieux et ne conteste pas du tout la façon dont vous l’avez décrite, sénateur.

Je crois comprendre que Pêches et Océans Canada a ouvert une enquête sur cet incident. On m’a également informé que le ministère avait pris contact avec les leaders de la communauté de cette région. Je n’en sais pas davantage sur l’enquête qui a été lancée, et même si j’avais de l’information, il ne serait pas approprié que je la partage avec les sénateurs. Toutefois, le gouvernement prend cette affaire très au sérieux. C’est inacceptable, et nous attendons avec impatience les résultats de l’enquête.

Le sénateur Prosper : Sénateur Gold, des tensions persistent entre Pêches et Océans Canada et les peuples autochtones dans toute la région de l’Atlantique.

(1450)

Quand Pêches et Océans Canada commencera-t-il à adopter une approche fondée sur les droits et à honorer convenablement l’arrêt Marshall, une décision rendue il y a environ 25 ans sur la gestion des pêches en territoire mi’kmaq?

Le sénateur Gold : Il est important que le ministère des Pêches et des Océans ainsi que tous les autres ministères respectent les droits reconnus dans la Constitution et les décisions de nos tribunaux et accordent la priorité à une approche fondée sur les droits des communautés autochtones dans la relation avec ces dernières.

Des pas ont été faits, mais il reste encore du travail à faire. Le gouvernement et le ministère des Pêches et des Océans sont déterminés à accomplir ce travail, conformément à leur responsabilité à cet égard. Ce que je comprends, c’est que le gouvernement fédéral en dira plus au sujet d’un futur examen en profondeur de la politique dans ce secteur.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté

Le traitement des demandes de visas

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, après huit longues années du gouvernement NPD-Trudeau, le système d’immigration du Canada est défaillant. On en voit la preuve partout autour de nous.

Global News a dit dernièrement que le gouvernement Trudeau avait dépensé au moins 115 millions de dollars au cours de la dernière année pour héberger des demandeurs d’asile dans des hôtels de Niagara Falls. On ne connaît pas l’ampleur totale des dépenses.

Selon le Toronto Sun, plus de 28 000 revendicateurs du statut de réfugié dont la demande a été refusée attendent d’être déportés. Parmi eux se trouvent 649 personnes éconduites en raison de crimes graves.

D’après la réponse à l’une de mes questions écrites, 34 000 demandeurs d’asile attendent une vérification de sécurité. Les délais de traitement et les arriérés vont en empirant, monsieur le leader. La plus ancienne des demandes pour lesquelles on attend toujours une vérification de sécurité a été soumise en mai 2019.

Monsieur le leader, pourquoi devrait-on croire que le gouvernement Trudeau sera en mesure de réparer ce qu’il a lui‑même terriblement bousillé?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Bon nombre des problèmes que vous avec soulevés, et d’autres que vous n’avez pas mentionnés, sont inacceptables au Canada, y compris le fait regrettable que des demandeurs d’asile se retrouvent à dormir dans la rue. Il existe de meilleures solutions. Le gouvernement s’emploie à trouver de nouvelles et de meilleures façons de relever les défis que connaît le système.

Pour revenir à vos observations à propos de l’hébergement dans les hôtels, rappelons que le gouvernement a affecté 362 millions de dollars, par l’entremise du Programme d’aide au logement provisoire, pour continuer d’aider les municipalités à héberger les demandeurs d’asile et les réfugiés. Cette somme s’ajoute au financement de plus de 200 millions de dollars annoncé l’été dernier.

Le gouvernement est toujours résolu à régler les problèmes que connaît le système.

Le sénateur Plett : Même le premier ministre a déclaré, à une séance de photos la semaine dernière, que l’immigration temporaire a « [...] atteint un rythme bien supérieur à ce que le Canada a été en mesure d’absorber ».

Monsieur le leader, qui a été au pouvoir ces huit dernières années, d’après lui? Si le système qu’il décrit n’est pas défaillant, alors quelle est l’explication?

Le sénateur Gold : Le gouvernement prend au sérieux ses responsabilités et son mandat.

Le ministre de l’Immigration a annoncé ces derniers temps des ajustements à diverses facettes de la politique d’immigration afin de mieux harmoniser cela avec la capacité des provinces, des universités et du marché du travail d’absorber et d’intégrer, au besoin, les arrivants, et le gouvernement va continuer dans cette voie.

[Français]

Son Honneur la Présidente : La période des questions est terminée.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Le discours du Trône

Motion d’adoption de l’Adresse en réponse—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Gold, c.p., appuyée par l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson,

Que l’Adresse, dont le texte suit, soit présentée à Son Excellence la gouverneure générale du Canada :

À Son Excellence la très honorable Mary May Simon, chancelière et compagnon principal de l’Ordre du Canada, chancelière et commandeure de l’Ordre du mérite militaire, chancelière et commandeure de l’Ordre du mérite des corps policiers, gouverneure générale et commandante en chef du Canada.

QU’IL PLAISE À VOTRE EXCELLENCE :

Nous, sujets très dévoués et fidèles de Sa Majesté, le Sénat du Canada, assemblé en Parlement, prions respectueusement Votre Excellence d’agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu’elle a adressé aux deux Chambres du Parlement.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, peu d’entre nous étaient présents lorsque le sénateur George Baker siégeait dans cette auguste enceinte, mais le sénateur Baker avait l’habitude de se lever et de dire : « J’ai seulement quelques mots à dire » pour parler d’un sujet.

J’ai quelques mots à dire aujourd’hui sur le discours du Trône et, en particulier, sur l’héritage que léguera Justin Trudeau — son héritage de scandales.

Chers collègues, nous sommes dans la neuvième année du règne de Justin Trudeau. Il appartiendra aux historiens d’écrire, dans quelques années, ce qu’il y a lieu de retenir exactement de lui. Toutefois, je profite de l’occasion pour évoquer quelques faits marquants de l’héritage du premier ministre.

Dans son rapport de 2015 sur les dépenses des sénateurs, l’ancien juge de la Cour suprême, Ian Binnie, a écrit ce qui suit :

Les sénateurs ont également pour rôle important de questionner et de critiquer le gouvernement ainsi que de lui demander des comptes. Pour adopter le discours traditionnel de sir Walter Bagehot, il revient aux Chambres du Parlement d’informer la nation des défauts de l’administration et même d’enseigner à la nation ce qu’elle ne sait pas.

Chers collègues, voilà l’objet de ce discours : enseigner à la nation, lui dire ce qu’elle ignore peut-être au sujet de Justin Trudeau ou, plutôt, rappeler aux Canadiens ce qu’ont été ces neuf dernières années.

Je sais que certains d’entre vous rêvent d’un Sénat qui serait au‑dessus de tout esprit partisan. Bien sûr, lorsque c’est un libéral qui le dit, cela signifie que le Sénat ne devrait jamais critiquer les libéraux. Leur définition de la partisanerie est simple : attaquer les libéraux, c’est de la partisanerie, mais attaquer les conservateurs, c’est du débat démocratique. Nous ne tomberons pas dans ce piège, chers collègues.

Pour citer le premier ministre lui-même :

Si le Sénat a un rôle à jouer, c’est assurément de servir de contrepoids au pouvoir extraordinaire que détiennent le premier ministre et son cabinet [...]

Voilà, chers collègues, ce que fait l’opposition conservatrice au Sénat depuis 2015. C’est ce que nous continuerons à faire tant que les libéraux parviendront à se maintenir au pouvoir.

Le premier aspect de l’héritage de Justin Trudeau que je souhaite souligner, c’est son bilan et celui de son gouvernement en matière d’éthique. La motion sur le discours du Trône est l’occasion idéale de le faire, et je vais couvrir une grande partie de la politique générale du gouvernement.

Historiquement, le Parti libéral du Canada a toujours favorisé une culture de népotisme et de corruption. Pourtant, les libéraux de Trudeau sont d’une espèce particulière. Tout d’abord, ils sont totalement incompétents. Leurs nombreux manquements à l’éthique résultent donc d’un mélange de bêtise, d’incompétence et de turpitude morale.

Les libéraux de Trudeau ont également la particularité de croire que tout ce qu’ils font, même si c’est contraire à l’éthique, est fait pour une cause honorable. Ils croient sincèrement qu’ils sont au‑dessus des lois et que les règles d’éthique ne s’appliquent qu’aux simples mortels, et non à eux, les grands défenseurs de la justice.

Permettez-moi de citer Andrew Coyne qui, en décembre dernier, a écrit ceci dans le Globe and Mail :

[…] les libéraux ont toujours eu tendance à se laisser corrompre par le pouvoir, mais les libéraux actuels sont les seuls à se laisser corrompre par leur propre vertu.

La vanité morale prétentieuse qui caractérise les libéraux de Trudeau — la reconnaissance, comme dans la prière des pharisiens, de ne pas être « comme les autres » — n’est malheureusement pas un numéro. C’est quelque chose qu’ils croient réellement, au point d’être littéralement incapables de concevoir qu’ils puissent mal agir.

Ce n’est pas seulement qu’ils sont entourés de gens comme eux, mais qu’ils sont entourés de gens qui pensent comme eux et dont la première pensée est que tout ce qu’ils pensent est forcément pour le bien […]

(1500)

C’est ce qu’a écrit Andrew Coyne. Les libéraux de Trudeau sont devenus si insensibles aux manquements à l’éthique qu’ils ne les reconnaissent même plus. Il aura fallu leur infliger le supplice de la question — par leur propre faute — avant qu’ils finissent par admettre qu’il y avait peut-être un problème. Puis, lorsqu’ils se font prendre en défaut, ils veulent qu’on leur pardonne et qu’on oublie ce qu’ils ont fait, marmonnant des excuses, la larme à l’œil. Nous savons tous pertinemment que leurs excuses ne sont pas sincères. Ils ne sont même pas de bons comédiens. Ainsi, depuis 2015, les libéraux de Trudeau font ce qu’ont toujours fait les libéraux : ils donnent des emplois et des contrats à leurs amis. Bien entendu, l’un des prix les plus convoités est la nomination à la magistrature.

Dès qu’il est arrivé au pouvoir, Dominic LeBlanc a écrit aux juges de la citoyenneté pour les inciter à démissionner afin qu’il puisse nommer des libéraux à leur place. Les médias nous informent que des juges de hautes instances ont assisté à des activités de financement coûteuses du Parti libéral du Canada avant d’être nommés par Trudeau. En fait, les journalistes ont découvert que plus de 75 % des juges canadiens nommés sont des bailleurs de fonds du Parti libéral du Canada.

Une voix : C’est scandaleux.

Le sénateur Plett : Au moins six des juges actuels des cours supérieures auraient payé pour rencontrer le premier ministre ou la vice-première ministre lors d’activités de financement du Parti libéral peu de temps avant leur nomination. Le ministre de la Justice et le Cabinet du premier ministre ont dû reconnaître qu’ils avaient utilisé la Libéraliste pour faire les nominations à la magistrature.

C’est peut-être pour cette raison que le gouvernement peine à nommer suffisamment de juges — le bassin de partisans libéraux fond à vue d’œil.

Il y a également toutes sortes de problèmes dans le processus des nominations diplomatiques employé par Justin Trudeau. Vous souvenez-vous que le premier ministre a congédié Stéphane Dion, le pire ministre des Affaires étrangères que le Canada ait connu depuis des lustres? C’était une bonne chose, mais les libéraux ont cafouillé dans sa nomination à titre d’ambassadeur, parce qu’ils lui ont confié deux postes différents. Sa nomination au poste d’ambassadeur auprès de l’Union européenne a dû être annulée à cause des protestations de l’Union européenne.

Parlant de nominations bâclées de ministres déchus, personne n’aura oublié John McCallum, tellement incompétent qu’il a fallu le congédier deux fois — d’abord lorsqu’il était ministre puis lorsqu’il était ambassadeur en Chine. Il avait simplement oublié qu’il était en Chine pour défendre les intérêts du Canada, pas ceux de la Chine.

Beaucoup de membres de la clique à Trudeau finissent par décrocher des postes diplomatiques. Ce ne serait pas si grave si on leur versait la même rémunération que reçoivent habituellement les diplomates canadiens. Or, au moins neuf libéraux proches du parti ont reçu une rémunération supérieure à la normale, dont trois ex‑ministres.

Je concède volontiers qu’une personne issue de la sphère publique peut faire un excellent diplomate et que le premier ministre n’est pas obligé de nommer des diplomates de carrière comme ambassadeurs ou consuls. Cependant, qu’est-ce qui justifie le fait que ces bénéficiaires de nominations politiques sont mieux payés qu’un diplomate de carrière? Le coût de la vie à Paris, Londres ou New York est-il plus élevé pour un ami de Justin Trudeau que pour un bureaucrate? Je suppose que c’est le cas si vous souhaitez inviter Justin Trudeau à passer la nuit chez vous. C’est un bon exemple de ce que les Canadiens appellent les « prétentions libérales ».

Un de ces libéraux surpayés est Bob Rae, ambassadeur aux Nations unies et ancien chef libéral. L’homme a réussi à insulter une série de personnes sur Twitter, y compris le premier ministre britannique et le gouvernement du Québec. Est-ce là ce que l’on attend d’un ambassadeur sous le gouvernement Trudeau? Ces gazouillis ont-ils été autorisés par un employé d’Affaires mondiales Canada? Nous ne le savons pas. J’ai inscrit des questions au Feuilleton à ce sujet, mais elles restent sans réponse après deux ans. Ah oui, nous sommes censés modifier le Règlement afin que le sénateur Gold soit obligé de répondre à nos questions. De toute évidence, notre ambassadeur bien payé est tout sauf un diplomate et le gouvernement Trudeau aimerait que nous l’oubliions. Puisque nous parlons de proches du Parti libéral, j’ai hâte de voir si l’ancienne ministre Carolyn Bennett touchera une rémunération supplémentaire pour son poste à Copenhague.

Ensuite, il y a le cas de Dominic Barton. L’ancien dirigeant de McKinsey & Company a été envoyé à l’ambassade de Pékin après que Justin Trudeau a renvoyé John McCallum. Chez McKinsey, M. Barton prêchait la nécessité pour le Canada de se rapprocher de la Russie et de la Chine. Nous sommes tous conscients de la folie d’une telle approche. Il s’agit de la dernière nomination politique en Chine. M. Trudeau reconnaît maintenant que, bien qu’il admire leur dictature, les Chinois, eux, ne lui rendent pas la pareille, car ils n’admirent pas la « petite patate ». M. Barton est également considéré comme l’architecte de la politique libérale de la porte ouverte en matière d’immigration et de la Banque de l’infrastructure du Canada, deux des nombreuses politiques désastreuses de ce gouvernement.

Le rôle exact que M. Barton a joué dans les affaires louches de McKinsey & Company pendant qu’il y travaillait demeure inconnu. C’est ce cabinet qui a conseillé Purdue Pharma au sujet de sa stratégie visant à rendre des milliers de gens dépendants de l’OxyContin et qui a maintenant accepté de payer près de 1 milliard de dollars en règlements à cause de cette affaire. Faire confiance au haut dirigeant de cet organisme témoigne au mieux d’un grave manque de sens moral de la part de Justin Trudeau.

David MacNaughton, un autre libéral grassement payé et un bon ami de Justin Trudeau, a été le premier et le seul ambassadeur de l’histoire du Canada à faire l’objet d’une enquête et à être reconnu coupable par le commissaire à l’éthique.

Parlant du poste de commissaire à l’éthique, à la suite de la démission de Mario Dion, le gouvernement libéral a décidé de nommer Martine Richard, la belle-sœur de Dominic LeBlanc, pour le remplacer. Ils ne voyaient rien de mal là-dedans jusqu’à ce que les protestations du public forcent Mme Richard à démissionner.

Je cite une fois de plus Andew Coyne : « [...] ils sont littéralement incapables de concevoir qu’ils puissent faire quelque chose de mal. » Nommer sa belle-sœur ne peut être considéré comme du népotisme lorsqu’on est libéral. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Andrew Coyne.

Après le départ de Mme Richard, Justin Trudeau a laissé le poste vacant pendant six mois. Il a ensuite nommé un bureaucrate de carrière au poste de commissaire par intérim et, six mois plus tard, il a rendu cette nomination permanente. De toute évidence, les libéraux ne prennent pas ce poste au sérieux. Le fait que le gouvernement libéral soit, de loin, le pire délinquant de l’histoire en matière d’éthique explique probablement pourquoi il ne souhaitait pas nommer quelqu’un qui n’a pas de liens avec lui et qui va faire ce travail sérieusement.

Parlant des mandataires du Parlement, vous vous souviendrez de la décision prise par le gouvernement Trudeau en 2017 de nommer Madeleine Meilleur au poste de commissaire aux langues officielles. Or, l’ancienne députée libérale provinciale de l’Ontario a retiré sa candidature lorsqu’on a appris qu’elle avait discuté de ce poste avec des membres clés du Cabinet du premier ministre.

Toutefois, ce qu’il y a de pire que des mauvaises nominations, c’est l’objectif manifeste du gouvernement Trudeau d’affaiblir les mandataires du Parlement en ne leur accordant pas toutes les ressources dont ils ont besoin pour faire leur travail. Les libéraux veillent à ce que l’ampleur de leur incompétence et de leur corruption ne soit pas dévoilée au public.

Comme Karen Hogan, la vérificatrice générale, l’a elle-même déclaré :

Lorsque vous êtes dépendants du financement versé par une entité qui fait l’objet de votre audit, cette entité a une incidence sur votre capacité d’agir en toute indépendance.

Le gouvernement Trudeau a même tenté de miner la crédibilité du directeur parlementaire du budget quand ce dernier a conclu que les politiques de ce gouvernement en matière d’environnement n’en valent pas le coût. Steven Guilbeault, le ministre de l’Environnement du Changement climatique, s’en est pris au directeur parlementaire du budget tandis que Gerald Butts l’a traité d’incompétent tout en l’accusant de nuire grandement aux discussions en matière de politiques au Canada.

(1510)

Les libéraux respectent l’arbitre seulement lorsqu’il ne leur décerne pas de pénalité.

Bien entendu, la gouverneure générale ne fait pas partie du gouvernement, mais c’est le gouvernement qui recommande la nomination de la gouverneure générale et qui gère le Bureau de la gouverneure générale. Les anciens gouverneurs généraux ont une allocation de dépenses de 206 000 $ par année en plus de leur pension annuelle de 150 000 $ à vie. Même s’il est possible de connaître les détails des dépenses de l’ensemble des ministres, des députés, des sénateurs et des membres de leur personnel, le public canadien ne peut connaître les détails des dépenses des anciens gouverneurs généraux. Nous avons appris en 2021 que le Bureau du secrétaire de la gouverneure générale est incapable de fournir de tels détails. Non seulement cela est-il contraire à l’esprit du gouvernement ouvert que Justin Trudeau avait promis en 2015, mais cela soulève également de nombreuses questions sur la manière dont on dépense l’argent des contribuables.

Julie Payette a été nommée gouverneure générale en 2017. Elle a été choisie par le premier ministre lui-même, après que celui-ci a refusé de respecter le processus mis en place par le premier ministre Harper, selon lequel un comité devait approuver les nominations. Voilà qui est surprenant de la part d’un homme qui aime que des comités l’aident dans ses nominations.

Elle a été nommée sans vérification approfondie. Un processus d’approbation aurait montré qu’elle faisait l’objet d’une enquête pour avoir renversé un piéton et commis des actes de violence contre son conjoint. Il aurait montré qu’elle avait fait l’objet d’accusations de harcèlement dans tous ses postes précédents. On l’a appris dans les médias après sa nomination.

Mme Payette a immédiatement embauché une bonne amie comme secrétaire principale. Elle a demandé qu’on effectue des rénovations à Rideau Hall pour lui permettre de sortir par la porte arrière sans devoir croiser les fichus touristes qui visitent l’endroit. Lors de son premier discours, elle a réussi à insulter les Canadiens qui croient en Dieu. Lors de son premier discours du Trône, elle a décidé d’improviser. Elle a utilisé son avion pour aller d’Ottawa à Mirabel, un vol de 20 minutes, afin de se rendre à son chalet avec des repas préparés par le chef de Rideau Hall.

Lorsque les histoires concernant le traitement de son personnel ont été rendues publiques, Justin Trudeau n’a eu d’autre choix que de licencier cette Marie-Antoinette des temps modernes.

Ce fiasco a coûté aux Canadiens des millions de dollars, non seulement en raison de ses dépenses frivoles, mais aussi en raison des dédommagements accordés aux nombreuses victimes qu’elle a faites sur son chemin. S’il y a une nomination qui symbolise l’héritage de Justin Trudeau, c’est bien celle-là. Elle a été conclue sur une serviette de table, basée simplement sur la légende qui entoure la personne et non sur ses qualités réelles — de la poudre aux yeux, pas de véritable réflexion, pas de diligence raisonnable et des résultats désastreux.

En 2021, même Dominic LeBlanc a admis — je cite une manchette de CTV News pour un reportage de La Presse canadienne — que « le fiasco de l’affaire Payette montre la nécessité de renforcer le processus de sélection des gouverneurs généraux ».

Ils n’ont même pas trouvé un Canadien bilingue pour la remplacer.

Cela n’aurait pas été si mal si l’actuelle gouverneure générale était une légende, mais c’est tout le contraire. On n’a entendu parler d’elle que lorsque les médias canadiens ont été en mesure d’obtenir des informations sur ses dépenses somptueuses, comme un montant de 100 000 $ pour les repas à bord des vols vers Dubai, soit l’équivalent de 218 $ par assiette. Ce voyage, auquel elle a invité 40 amis et connaissances, a coûté aux Canadiens 1,3 million de dollars.

Les dépenses à Rideau Hall ont augmenté de 11 % en 2022, et nous pouvons nous attendre à un chiffre semblable pour 2023. À l’heure actuelle, les coûts du bureau vice-royal se chiffrent à environ 40 millions de dollars par année.

Même s’il s’agit d’une somme exorbitante, le gouvernement Trudeau a rejeté une demande de tous les partis en faveur d’une comptabilité publique et d’un examen plus approfondi des dépenses de la gouverneure générale Mary Simon. On peut se demander pourquoi le gouvernement a si peur de montrer le détail de ces dépenses.

Non seulement Justin Trudeau a réussi à ternir la réputation du poste de gouverneur général en procédant à des nominations médiocres, mais il a également réussi à détruire l’excellente réputation de David Johnston, l’un des meilleurs gouverneurs généraux dont je me souvienne, en tentant de dissimuler son propre refus de défendre le Canada contre les intérêts et les menaces étrangers.

Lorsque l’on a appris que la Chine était parvenue à s’ingérer dans les élections canadiennes, le premier ministre a tenté de dissimuler l’aide qu’il avait reçue du gouvernement communiste de Pékin en utilisant M. David Johnston. M. Trudeau a nommé un ami de sa famille, son copain de ski, son voisin de chalet et un membre de la Fondation Pierre Elliott Trudeau, financée par Pékin, au faux poste de rapporteur spécial destiné à légitimer une autre opération de camouflage des libéraux. Après avoir nié pendant huit mois les preuves évidentes de conflit d’intérêts, après avoir refusé de respecter la volonté du Parlement d’autoriser une enquête publique et après avoir engagé des avocats et des consultants libéraux pour tenter de légitimer le processus bidon, le rapporteur spécial du premier ministre a finalement fait ce qu’il fallait et a démissionné.

Ce cirque coûte aux contribuables des millions de dollars en honoraires versés pour rien à des libéraux bien branchés.

L’enquête publique commence à peine, mais nous savons déjà que de nombreuses preuves de l’influence étrangère sur les résultats des deux dernières élections ont été passées sous silence par le rapporteur spécial.

L’incompétence, jumelée à l’aveuglement volontaire, de hauts fonctionnaires dans le traitement de ce dossier est tout simplement stupéfiante, car, bien sûr, la corruption s’étend à l’ensemble du gouvernement. Permettez-moi de citer rapidement les plus grands scandales du gouvernement de Justin Trudeau. Je ne les énumérerai pas tous, car cela prendrait des semaines. Je ne donnerai que quelques exemples.

Premièrement, des fonds ont été accordés à des consultants racistes embauchés pour lutter contre le racisme. Oui, vous avez bien entendu : des gens qui disent être contre le racisme alors que ce n’est qu’une façade. Laith Marouf, connu pour être un antisémite violent, a reçu 500 000 $ de la part du gouvernement Trudeau pour son travail sur le racisme.

Il ne s’agit pas d’un incident isolé. Le Community Media Advocacy Centre, à Montréal, a aussi reçu des subventions, bien que ce centre organise régulièrement des événements où l’on se lance dans des diatribes antisémites. Le ministre Omar Alghabra n’a jamais expliqué comment un organisme antisémite, qui a déclaré que l’Holocauste était un canular et qui a applaudi au massacre des Juifs, avait été invité à une réception qu’il avait tenue sur la Colline du Parlement.

Il y a d’autres cas comme ceux-là.

Il n’est donc pas surprenant que les libéraux choisissent les formes de racisme contre lesquelles il faut lutter. Ils financent le groupe Canadian Anti-Hate Network, qui, de son propre aveu, ne s’attaquera pas à l’antisémitisme provenant de la gauche parce qu’il se concentre sur la haine propagée par l’extrême droite. Il n’existe pas de haine chez les partisans de la gauche.

Il n’y a pas que les consultants qui peuvent être antisémites. Les libéraux embauchent aussi des antisémites dans les cabinets des ministres. Un conseiller juridique principal du ministre libéral des Relations Couronne-Autochtones a fait circuler des publications sur les médias sociaux approuvant la violence révolutionnaire des Palestiniens et soutenant leur libération par tous les moyens nécessaires. Cette personne a utilisé un mot-clic appelant à la destruction d’Israël.

Il y a aussi le cas d’Amira Elghawaby, la soi-disant représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie, qui a déjà dit qu’une décennie de Stephen Harper en tant que premier ministre a été plus nuisible que le 11 septembre. Elle a une vision extrêmement étroite. Elle ne voit qu’un seul type de discrimination, qu’elle considère comme omniprésent et qui ne provient que de la droite — une autre personne nommée par les libéraux et grassement payée qui n’apporte rien et qui n’a aucune crédibilité.

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Je vais maintenant parler d’un autre type de scandale chez les libéraux. Tous les sénateurs ici présents savent que les périodes où les libéraux sont au pouvoir sont toujours bonnes pour les proches de leur parti. Le favoritisme, le népotisme et les largesses dont profitent les bons amis et les alliés politiques ont toujours été des caractéristiques des gouvernements libéraux à Ottawa. Il n’est donc pas étonnant que ce genre de pratiques aient été répandues au cours des huit dernières années. Il est bien connu que plusieurs proches du gouvernement libéral ont gagné beaucoup d’argent à la suite de la légalisation du cannabis.

FinDev Canada a investi 43,4 millions de dollars dans une compagnie de téléphone kényane, M-KOPA. Jesse Moore, un militant de Toronto ayant des liens avec les libéraux, était le propriétaire de cette compagnie. L’intérêt pour les Canadiens d’investir dans une compagnie de téléphone en Afrique, alors que les frais de cellulaires au Canada sont parmi les plus élevés au monde, était déjà discutable, mais la perte de tout cet argent montre le ridicule d’une telle décision.

Le gouvernement Trudeau a donné de l’argent à Canada 2020 pour parrainer une conférence où des ministres libéraux figuraient comme conférenciers. Canada 2020 se décrit comme un groupe de réflexion progressiste. Il est dirigé par Tom Pitfield, un ami de longue date de Justin Trudeau et l’époux de la députée libérale Anna Gainey, ancienne présidente du Parti libéral du Canada.

Technologies du développement durable Canada est maintenant connu comme étant la caisse noire environnementale des libéraux. Plus de 150 millions de dollars ont été détournés vers des entreprises appartenant à des membres du conseil d’administration. La présidente du conseil d’administration et la PDG ont toutes deux démissionné. Le gouvernement prétend qu’il est étonné. Or, nous savons maintenant que le ministre a été prévenu il y a des années qu’il y avait un problème concernant cet organisme. Comme d’habitude, le gouvernement tente de camoufler ce scandale, payant généreusement des consultants pour qu’ils préparent des rapports pendant qu’il fait obstacle à toute véritable enquête avec l’aide du NPD. Pourtant, le sénateur Gold nous assure constamment que le gouvernement prend ces problèmes au sérieux. Il l’a dit quatre fois aujourd’hui.

En 2020, le gouvernement a versé 150 millions de dollars à Medicago Inc., une entreprise située dans la circonscription de Jean-Yves Duclos, pour des vaccins contre la COVID-19 qui n’ont jamais été livrés. L’entreprise a également touché 173 millions pour la recherche, ce qui porte le total de l’aide financière qu’elle a reçue du gouvernement fédéral à 323 millions de dollars. Medicago devait construire une usine de vaccins, mais cela ne s’est jamais concrétisé. Encore une fois, les libéraux, avec le concours de leurs amis, ont mis un terme à toute enquête visant à déterminer pourquoi les contribuables ont payé une telle somme et n’ont absolument rien reçu en retour.

La crise de la COVID-19 a été comme un bar ouvert en ce qui concerne l’octroi de contrats à fournisseur unique à des proches du Parti libéral. Nous ne connaîtrons jamais l’ampleur de la situation. Le gouvernement a catégoriquement refusé de fournir un rapport détaillé des dépenses. Grâce à l’opposition conservatrice au Sénat, nous avons pu apprendre qu’un contrat de 208 millions de dollars a été accordé à la société d’experts-conseils Accenture pour administrer le programme de prêts aux entreprises pendant la pandémie, une tâche qui aurait dû être confiée à la fonction publique. Une grande partie de ce travail a été effectuée à partir des bureaux brésiliens d’Accenture. Le gouvernement a menti à ce sujet pendant des mois.

En parlant des consultants qui ont eu la vie facile sous Justin Trudeau, les libéraux dépensent maintenant plus de 21 milliards de dollars — oui, milliards — par an pour des consultants externes, même s’il y a maintenant 100 000 fonctionnaires de plus qu’en 2015. Justin Trudeau a tout de même doublé le montant d’argent des contribuables qui est versé à des consultants. McKinsey, le cabinet de Dominic Barton — le gars dont j’ai déjà parlé —, a reçu plus de 100 millions de dollars depuis l’arrivée au pouvoir de son ami Justin Trudeau. KMG, Deloitte, PwC et EY se sont tous enrichis sous le gouvernement actuel. La situation est si grave que les libéraux ont même octroyé un contrat à KPMG pour étudier les moyens de réduire le nombre de contrats accordés à des consultants. Ce serait drôle si ce n’était pas aussi terriblement triste.

Il n’est pas étonnant que ce gouvernement ait perdu tout sens moral. Cela vient d’en haut. Katie Telford et Gerald Butts ont reçu plus de 200 000 $ pour déménager à Ottawa, même s’ils travaillaient déjà depuis des années au bureau de M. Trudeau. Où ça? Ici même, à Ottawa. Je suppose qu’ils ont déménagé de l’autre côté de la rue.

Je vais maintenant parler des trois scandales du gouvernement libéral qui figurent en tête de liste jusqu’à présent. Je dis « jusqu’à présent » parce que nous n’avons aucune idée de ce que nous pourrions apprendre plus tard sur la corruption libérale. Il pourrait y avoir un livre sur chacun d’entre eux, ou du moins un long chapitre dans la biographie de M. Trudeau. Je n’entrerai pas dans les détails; je vais simplement faire un rappel.

Le premier des trois principaux scandales est l’affaire SNC-Lavalin. Elle a commencé quand les libéraux ont apporté en catimini une modification au Code criminel dans le projet de loi d’exécution du budget afin de permettre au gouvernement de conclure des accords avec des sociétés reconnues coupables de corruption. Encore une fois, c’était pour anticiper la situation : « Nous savons que des gens se livreront à la corruption, alors trouvons-leur une porte de sortie. » Cette modification a été apportée après des mois de lobbying intense de représentants et d’avocats de SNC-Lavalin auprès de plusieurs dirigeants libéraux, y compris au sein du Cabinet du premier ministre. La société d’ingénierie et de construction SNC-Lavalin était visée par plusieurs allégations de corruption de fonctionnaires au Canada et ailleurs dans le monde. Le premier ministre a lui-même fait pression sur l’ancienne procureure générale Jody Wilson-Raybould pour qu’elle conclue un accord permettant à SNC-Lavalin de s’en tirer à bon compte. Elle était d’avis que SNC-Lavalin ne répondait pas aux critères prévus dans les dispositions ajoutées au Code criminel quelques mois auparavant, mais le premier ministre a envoyé son plus fidèle conseiller, le greffier du Conseil privé, pour faire comprendre à la ministre qu’elle devait obéir, sinon...

La ministre Wilson-Raybould avait plus de crédibilité que quiconque au sein du Cabinet du premier ministre, et elle n’a pas bronché. C’est pour cette raison qu’elle a été transférée à Anciens Combattants, ce qui a permis à David Lametti d’obtenir le poste de procureur général, qui n’avait pas le même sens moral que Mme Wilson-Raybould. Il était simplement heureux de faire partie du Cabinet, alors il a signé tous les documents que Justin Trudeau lui a présentés.

Lorsque ce scandale a éclaté au grand jour, le premier ministre a prétendu que ce qui était publié dans le Globe and Mail était faux. Ce n’était bien entendu pas le cas. Justin Trudeau a menti, et son Cabinet a tenté, en vain, de salir la réputation de Mme Wilson-Raybould dans les médias. Justin Trudeau a perdu ce que je considère être ses deux meilleurs ministres, soit mesdames Wilson-Raybould et Jane Philpott, et son précieux conseiller Gerald Butts a été obligé de démissionner. Le greffier du Conseil privé en a fait autant peu après. Ce fut un fiasco politique total et un échec retentissant sur le plan de l’éthique.

L’affaire SNC Lavalin a été plus qu’une simple violation des règles en matière d’éthique. Le premier ministre a bafoué la séparation des pouvoirs entre son Cabinet et le bureau du procureur général. Il a été si incompétent ou si corrompu qu’il a fait fi du principe de Shawcross afin d’aider des amis à éviter des poursuites criminelles. Pour parvenir à ses fins, il a sacrifié la première ministre de la Justice autochtone.

Au deuxième rang des trois principaux scandales Trudeau, on retrouve le scandale de l’organisme UNIS. Vous vous souviendrez que le gouvernement avait signé un contrat avec les dirigeants de cet organisme pour leur verser près de 1 milliard de dollars, à distribuer à de jeunes Canadiens. L’organisme UNIS entretenait pourtant des liens étroits avec la famille Trudeau, l’ancien ministre des Finances, le Cabinet du premier ministre et le Parti libéral. Des membres de la famille Trudeau recevaient une rémunération de l’organisme UNIS, sans oublier que l’ancien ministre Morneau et sa famille se sont fait payer un voyage luxueux en Afrique. Ce qui me chicote au sujet du scandale de l’organisme UNIS, c’est que je ne comprends pas comment le premier ministre Trudeau et ses ministres ont crû que c’était une bonne idée de donner 1 milliard de dollars à une tierce partie dépourvue d’expérience pertinente, avec le mandat de dépenser allègrement cet argent auprès d’un groupe non défini de personnes, en se fondant sur des critères tellement vagues que n’importe quoi pouvait s’y retrouver.

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À première vue, ce programme n’avait absolument aucun sens. Il s’agissait simplement d’une façon de créer une impression de bien‑être en distribuant de l’argent à de faux entrepreneurs sociaux. Il est ahurissant que l’organisme UNIS ait pu résister à une vérification rigoureuse de plus de 10 minutes avant qu’on se rende compte qu’il était fondé sur des mensonges et des tromperies. En fait, lorsque les médias ont commencé à gratter la surface, le château de cartes de l’organisme UNIS s’est effondré. Heureusement, le programme a pris fin immédiatement, mais pas parce que M. Trudeau et ses ministres avaient soudainement compris qu’ils avaient commis une erreur. Non, c’est plutôt parce que des conflits d’intérêts manifestes ont été mis en évidence. Les libéraux n’ont jamais pensé que le fait de choisir l’organisme UNIS pour ce travail pourrait poser problème. Il est incroyable qu’autant de conflits d’intérêts aient pu converger vers un même programme gouvernemental mais, malgré tout, la situation n’a pas suscité d’inquiétude au sein du Cabinet du premier ministre ni parmi les ministres.

Il n’y a aucune explication à cela, si ce n’est que le gouvernement est tellement aveuglé par sa propre outrecuidance qu’il n’est même plus capable de reconnaître un manquement à l’éthique lorsqu’il lui saute aux yeux et qu’il ne peut plus appliquer le simple bon sens à une décision. On pouvait voir le premier ministre et son cabinet feindre l’indignation et présenter de tièdes excuses, comme s’ils n’avaient pas la moindre idée de ce qui se passait. On pouvait le voir dans la mine agacée qui passait sur leurs visages lorsqu’ils étaient interrogés par l’opposition ou parfois même par la presse libérale. On aurait dit qu’ils étaient offensés que quelqu’un ose mettre en doute la pureté de leurs intentions. Ils sont d’une telle arrogance qu’ils croient que c’est le cas.

Le troisième scandale de la liste est l’affaire « ArnaqueCAN ». J’ai déjà parlé des contrats à fournisseur unique lucratifs qui ont été accordés à tout va pendant la pandémie de COVID-19. Le gouvernement Trudeau a englouti des dizaines de milliards de dollars pour des produits et services de toutes sortes, et il devient de plus en plus clair qu’il n’y avait pas de mesures de contrôle et que l’argent n’était pas un problème. Le gouvernement a dépensé 60 millions de dollars pour une application qui était censée coûter 80 000 $. Cette application s’est avérée mal conçue et défaillante. Là encore, grâce au travail des conservateurs, la vérificatrice générale a été appelée à enquêter sur la question. Son rapport est accablant : il a mis au jour un système de corruption au sein de la bureaucratie, où des bureaucrates se font passer pour des consultants, où des contrats sont accordés à des organisations bidon et où le travail est effectué après que plusieurs intermédiaires ont pris une part du gâteau.

Par exemple, GC Strategies et ses partenaires sont devenus multimillionnaires sous le gouvernement Trudeau, et ils ont admis qu’ils étaient payés jusqu’à 2 600 $ l’heure pour faire du recrutement et qu’ils ne faisaient aucun travail informatique à proprement parler. Nous ne connaissons pas toute l’étendue de ce scandale. La coalition néo-démocrate—libérale tente désespérément d’empêcher les médias et les députés de faire toute la lumière sur le fait que Justin Trudeau a donné des millions de dollars à cette société informatique douteuse composée de deux personnes qui n’ont effectué aucun véritable travail informatique. Ce qui ressort peu à peu, c’est que ce système pourri n’est pas exclusif à l’affaire ArnaqueCAN — il est omniprésent au sein du gouvernement Trudeau.

Nous savons que la GRC fait enquête sur les marchés liés à « ArnaqueCAN », mais cela ne suffit pas. À mon avis, il faudrait rendre publics tous les contrats à fournisseur unique accordés pendant la pandémie de COVID-19 et expliquer pourquoi ils étaient nécessaires, pourquoi l’entrepreneur a été choisi, comment le prix a été fixé et qui a autorisé le contrat. Le scandale « ArnaqueCAN » montre également que les sociétés et les organismes d’État ne sont pas à l’abri de ce mélange d’incompétence et de corruption libérales.

Au cours des huit dernières années, plusieurs dirigeants de ces sociétés et organismes nommés par le gouvernement ont quitté leur poste prématurément dans des circonstances suspectes. C’est ce qui s’est produit notamment au Conseil national de recherches Canada, à VIA Rail et à la Banque de l’infrastructure du Canada. Étant donné que le gouvernement est allergique à l’ouverture, il est impossible de savoir pourquoi ces personnes ont été congédiées.

Puisqu’on parle du gouvernement libéral qui ne dit pas la vérité, précisons que des chiffres de Statistique Canada sur le marché du travail ont fait l’objet d’une fuite en 2020. Bloomberg a publié un reportage à ce sujet, et cela a eu une incidence sur la valeur du dollar canadien. Quatre ans plus tard, nous ne savons toujours pas ce qui s’est passé, qui est responsable de la fuite, si une personne s’est enrichie grâce à cela et si quelqu’un s’est fait prendre. Comme je l’ai déjà dit, quand les libéraux sont là, tout va pour les libéraux.

Au cours des huit dernières années, toutes les sociétés d’État ont continué à verser des primes faramineuses à leurs dirigeants alors qu’elles perdaient de l’argent ou n’atteignaient pas leurs objectifs. On peut citer la Banque de développement du Canada, Exportation et développement Canada et la Banque de l’infrastructure du Canada. Dans la fonction publique de Trudeau, les primes ne sont pas basées sur le rendement, elles sont un revenu garanti.

J’ai récemment reçu une réponse à l’une de mes questions inscrites au Feuilleton. L’année dernière, Exportation et développement Canada a versé plus de 40 millions de dollars en primes. Il s’agit d’une moyenne de 19 000 $ par employé. Le pire cas s’est certainement produit à CBC/Radio-Canada, dont la PDG a eu le culot de se plaindre de compressions budgétaires imaginaires, d’annoncer des licenciements massifs, puis d’accorder 15 millions de dollars de primes à ses cadres supérieurs.

Examinons maintenant tous les députés impliqués dans des scandales au cours du mandat de Justin Trudeau à titre de premier ministre.

George Chahal, un député de Calgary, s’est fait prendre à voler des dépliants dans des boîtes aux lettres. En mars 2023, Han Dong s’est retiré du caucus libéral après que Global News a rapporté des allégations selon lesquelles il aurait conseillé, en 2021, à de hauts dirigeants de Pékin de retarder la libération de Michael Kovrig et Michael Spavor, qui étaient alors détenus par la Chine. Le ministre Dominic LeBlanc a dit qu’il s’informerait auprès de l’agence de renseignement du Canada lorsqu’on l’a chargé d’évaluer la possibilité pour M. Dong de réintégrer le caucus libéral. Un an plus tard, M. Dong est toujours exclu du caucus. Soit le ministre LeBlanc n’a pas trouvé de moyen d’absoudre M. Dong, soit il a reçu une confirmation qu’il ne devrait pas réintégrer le caucus. Nous ne le savons pas.

Le conjoint de fait de la députée libérale Lisa Hepfner a dû rembourser les versements de la Prestation canadienne d’urgence qu’il a reçus alors qu’il n’y avait pas droit. La députée Pam Damoff, qui est secrétaire parlementaire, a fait du lobbying au nom d’un donateur du Parti libéral qui s’opposait au projet de loi C-280. Elle a assisté à des réunions du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes même si elle n’en était pas membre et elle a été la seule députée à voter contre le projet de loi C-280 à la Chambre.

Le scandale « ArnaqueCAN » dont j’ai parlé plus tôt a fait ressortir une chose: le recours abusif, par certaines personnes, aux programmes destinés aux Autochtones. Fait peu surprenant, ce phénomène est désormais répandu au Canada. Même des députés libéraux prétendent être d’origine autochtone, alors qu’ils ne le sont pas. Par exemple, Marc Serré, député de Nickel Belt, a affirmé qu’il continuerait de s’identifier comme Autochtone, et ce, même s’il a été retiré du registre de l’organisation Algonquins of Ontario lors d’un récent nettoyage. Il prétend être Algonquin parce qu’il a une ancêtre algonquine née dans les années 1630.

Lorsqu’il était secrétaire parlementaire du premier ministre, Greg Fergus a été pris en flagrant délit de violation de l’éthique, après avoir écrit une lettre au CRTC pour appuyer une demande soumise à cet organisme par une chaîne de télévision, ce qui a mené le commissaire à l’éthique — exaspéré par la situation — à réclamer une formation obligatoire sur les questions de conflits d’intérêts pour tous les ministres et secrétaires parlementaires. Depuis qu’il a été choisi comme Président, Greg Fergus a été impliqué dans une série d’actes répréhensibles. Il semble constamment oublier que, à titre de Président, il ne devrait pas faire de politique partisane.

Qui peut oublier qu’un ancien soldat de la Waffen-SS a été invité au discours prononcé par le président Zelenski devant la Chambre des communes? Le gouvernement Trudeau s’est empressé de faire porter le chapeau au Président de l’époque pour cette affaire. Or, plus tard, quand on a découvert que le premier ministre avait invité l’ancien nazi à une réception à Toronto, le Cabinet du premier ministre est resté étrangement silencieux. Si Justin Trudeau s’appliquait les mêmes normes que celles qu’il a appliquées à Anthony Rota, il aurait démissionné. C’est ce qu’il aurait dû faire.

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Tout cela uniquement depuis les dernières élections.

Prenons maintenant quelques minutes pour examiner les personnes intronisées au temple de la honte des libéraux de 2015 à 2021.

L’ancien député libéral William Amos s’est fait prendre deux fois dans une position indécente alors qu’il participait aux délibérations de la Chambre par vidéoconférence.

L’ancienne députée libérale Yasmin Ratansi employait sa sœur et la rémunérait à même les dollars des contribuables, une pratique interdite qu’elle a délibérément cachée aux Canadiens.

L’ancien député libéral Ramesh Sangha a été expulsé du caucus libéral en janvier 2021 après avoir accusé de multiples députés libéraux d’appuyer le mouvement du Khalistan.

L’ancien député libéral Darshan Singh Kang a dû quitter le caucus libéral en 2015 parce qu’il faisait l’objet d’accusations de harcèlement sexuel.

L’ancien député libéral Nicola Di Iorio ne s’est pas présenté au travail pendant un an après avoir annoncé sa démission en 2018. Puis, le public a appris qu’en fait, il n’avait pas démissionné. Il touchait toujours son salaire de député, alors même qu’il travaillait à plein temps pour un cabinet d’avocats de Montréal. À ce jour, ni Trudeau ni les libéraux n’ont fourni d’explications claires à propos de cette situation.

L’ex-député libéral Raj Grewal a admis avoir accumulé des millions de dollars de dettes de jeu aux tables de blackjack des casinos. Lorsqu’une enquête de la GRC a mis cette affaire en lumière, en 2018, il a démissionné du caucus libéral. Après avoir soudainement annoncé qu’il avait remboursé sa dette de plusieurs millions de dollars, il a gardé son poste de député jusqu’à la fin de la session parlementaire. Vous vous rappellerez que M. Grewal était déjà visé à l’époque par une enquête du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique et qu’il a été ensuite reconnu coupable de conflit d’intérêts.

L’ex-député libéral Marwan Tabbara a pu se présenter de nouveau pour le Parti libéral aux élections de 2019, en dépit d’allégations détaillées de harcèlement sexuel contre lui. Après son arrestation, en avril 2020, il a continué de faire partie du caucus pendant près de deux mois, parce que le Cabinet du premier ministre prétendait ne pas être au courant de l’affaire. Il a fallu qu’un journal en parle pour que les libéraux l’expulse du caucus.

Un autre ex-député libéral, Frank Baylis, a obtenu un des juteux contrats à fournisseur unique du gouvernement libéral pendant l’épidémie de COVID. Il a reçu 237 millions de dollars. Selon les chiffres de l’Agence de la santé publique du Canada, plus de 90 % des 10 000 respirateurs fournis par la Baylis Medical Company n’ont jamais été utilisés dans une clinique ou un hôpital.

Malheureusement, les ministres ont commis des manquements encore plus graves à l’éthique. Je vais donner quelques exemples. Il y en a eu beaucoup, alors je vais y aller en ordre alphabétique.

L’époux d’Anita Anand s’est retrouvé lui aussi dans le groupe sélect de ceux qui ont touché des contrats juteux pendant la pandémie. LifeLabs, une entreprise qui vend des trousses de dépistage, a conclu des marchés qui lui ont permis de recevoir des dizaines de millions de dollars. John Knowlton, l’époux d’Anita Anand, est l’un des dirigeants de LifeLabs. Depuis que Mme Anand a été élue au Parlement en 2019, LifeLabs a obtenu de nombreux contrats dont la valeur s’élève à des millions de dollars.

Quand Navdeep Bains était ministre de l’Industrie, des Sciences et de l’Industrie, il avait promis de sévir contre les grandes entreprises de télécommunications qui imposent des tarifs excessifs aux Canadiens pour leurs services Internet et de téléphonie cellulaire. Vous savez quoi? Il a décroché un emploi chez Rogers après avoir quitté le gouvernement. La commissaire au lobbying avait déclaré que cela l’irritait, sachant que les libéraux vont toujours trouver des échappatoires quand ils peuvent se remplir les poches.

Ensuite, il y a Bill Blair. À plusieurs reprises, il a menti et il s’est ingéré dans le travail de la Gendarmerie royale du Canada quand elle enquêtait sur la pire tuerie dans l’histoire du Canada, le massacre de Portapique, en Nouvelle-Écosse.

Alors qu’il était président du Conseil du Trésor, Scott Brison a tenté de bloquer l’approbation d’un contrat pour un navire de ravitaillement de la marine qui était en cours de construction au chantier naval Davie, au Québec, parce que la puissante famille Irving du Nouveau-Brunswick, propriétaire du chantier naval concurrent à Halifax, avait fait pression sur lui pour qu’il le fasse. L’ancien ministre Brison a également tenté de faire valoir qu’il n’était pas nécessaire de mettre en place un filtre anti-conflits d’intérêts pour l’empêcher de participer aux décisions gouvernementales qui impliquaient deux des familles les plus riches du Canada atlantique, même s’il avait été président de l’une de leurs sociétés d’investissement et que son épouse siégeait encore au conseil d’administration de l’entreprise.

François-Philippe Champagne possédait deux appartements à Londres, en Angleterre, d’une valeur de plusieurs millions de dollars. Ses hypothèques avaient été contractées auprès d’une banque chinoise. Il est étrange qu’un député canadien au Royaume‑Uni doive s’adresser à une banque chinoise pour obtenir un prêt hypothécaire.

Judy Foote a été impliquée dans l’affaire Frank Norman. J’en parlerai plus tard. Ce qui est intéressant ici, c’est qu’elle a démissionné pour des raisons de santé, mais, du jour au lendemain, sa santé s’est améliorée et elle a été récompensée avec le poste de lieutenante-gouverneure de Terre-Neuve-et-Labrador.

Steven Guilbeault a oublié de payer ses impôts, mais il n’a jamais oublié de partir en voyage, surtout en Chine. Ce ministre court le monde, occupé à faire la leçon aux Canadiens tout en chantant les louages des fonctionnaires de la Chine ou des Émirats du Golfe. Catherine McKenna et Jonathan Wilkinson, ses prédécesseurs à Environnement et Changement climatique Canada, étaient du même acabit : ils parcouraient le monde pour faire la leçon au commun des mortels sur le fait qu’ils devraient aller au travail à vélo.

Le personnel du cabinet de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, n’a pas lu un courriel indiquant que le ministère envoyait un représentant à une fête organisée par l’ambassade de Russie. Résultat : un représentant du ministère a bu de la vodka avec des fonctionnaires russes, pendant une fête, alors que Poutine venait d’envahir l’Ukraine.

Ne pas lire ses courriels est une caractéristique des ministres du Cabinet Trudeau et de leur personnel. C’est une excuse qu’ont donnée Bill Blair, Marco Mendicino et, bien sûr, Justin Trudeau.

Lorsque David Lametti a été chassé du Cabinet, beaucoup de gens se sont demandé pourquoi. Nous pensions, en effet, qu’il avait généralement agi comme le souhaitait le premier ministre. Ces dernières semaines, nous avons appris que Lametti avait annulé un verdict de meurtre au premier degré contre Jacques Delisle, un ancien juge, alors que tous les experts s’opposaient à cette décision. Lametti et le gouvernement ont refusé d’expliquer pourquoi il avait agi de la sorte, même si Delisle a ensuite plaidé coupable à une accusation d’homicide involontaire. Vous avez tous entendu les réponses évasives du sénateur Gold à nos questions sur ce sujet.

Qu’en est-il de Dominic LeBlanc qui, malgré ses liens avec la puissante famille Irving, a été nommé ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne? Il a dû consulter le commissaire à l’éthique pendant des semaines afin de déterminer comment contourner ce conflit d’intérêts évident.

Il y a aussi la fois où le ministre LeBlanc a fait l’aller-retour entre Moncton et Montréal à bord d’un jet appartenant à J.D. Irving Limited — il n’y a rien de mal là-dedans. Mais lorsque l’ancien commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique Dion a déclaré le ministre LeBlanc coupable d’avoir enfreint la Loi sur les conflits d’intérêts parce qu’il avait octroyé un permis pour la lucrative pêche à la mactre de Stimpson à une entreprise liée à un cousin de son épouse, le ministre LeBlanc n’a pas pu se défiler.

Puisqu’il est question de Dominic LeBlanc et de Scott Brison, je signale que nous ne savons toujours pas quel rôle ils ont joué exactement dans l’affaire du vice-amiral Norman. Les libéraux ont tenté de rompre un contrat conclu pour la construction d’un navire de ravitaillement afin de l’accorder aux Irving. Lorsqu’ils se sont fait prendre, ils ont décidé de devancer le vice-amiral Norman. Le premier ministre l’a même envoyé devant les tribunaux avant que la police n’ait terminé son enquête. Scott Brison et Judy Foote ont quitté leur poste, et les contribuables ont fini par payer une somme d’argent non divulguée versée au vice-amiral Norman. Voilà une opération de camouflage menée de main de maître.

Le cas de Marco Mendicino était désespéré — il y a eu des conflits d’intérêts, des courriels non lus, des mensonges éhontés formulés en public et de l’incompétence crasse. Lorsque l’on est mauvais au point où même Justin Trudeau pense que l’on est mauvais, on a atteint le fond du baril. Un jour, je prononcerai un discours portant exclusivement sur les scandales auxquels Marco Mendicino a été mêlé. Il faudra peut-être que l’on m’accorde un temps de parole illimité.

Les ministres organisent parfois des collectes de fonds à l’extérieur de leur circonscription, mais quand on représente une circonscription du centre-ville de Montréal, c’est bizarre. C’est encore plus étrange si cette activité de financement a lieu à New York, aux États-Unis. À ma connaissance, c’est une première, et cet honneur revient à Marc Miller.

Maryam Monsef a dû admettre qu’elle n’était pas née en Afghanistan, comme elle l’avait fait croire aux gens pendant des années.

Bill Morneau est un autre ancien ministre sujet aux scandales. Il a commencé sa carrière politique en enfreignant la Loi électorale, ce pour quoi il a reçu une amende. Après tout, il s’agit du même ancien ministre des Finances qui a oublié qu’il avait sa villa en France — et qui a oublié de la déclarer à la commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique.

(1550)

Il s’agit du même ministre des Finances qui a parrainé le projet de loi C-27, qui a fait augmenter la valeur des régimes de retraite vendus par sa propre société, Morneau Shepell. Lorsque ce projet de loi a été déposé à la Chambre des communes, la valeur des actions de Morneau Shepell a bondi, et il se trouve que le ministre Morneau détenait toujours 21 millions de dollars d’actions.

J’ai déjà parlé de son rôle dans le scandale de l’organisme UNIS. Au moment de sa démission, il a prétendu qu’il allait diriger l’Organisation de coopération et de développement économiques. Personne ne sait si c’était vrai. Ce qui est vrai, c’est que les contribuables ont payé la facture de sa campagne ratée. J’ai toujours une question inscrite au Feuilleton concernant le véritable coût. Elle demeure sans réponse depuis 25 mois. On a rapporté dans les médias que sa campagne bidon avait coûté au moins 11 millions de dollars.

Le commissaire à l’éthique a reconnu Mary Ng coupable d’avoir accordé des contrats à sa meilleure amie. Dans un gouvernement Trudeau, cela signifie que vous faites semblant d’être désolé et que vous ne subissez aucune conséquence.

Qu’en est-il de Seamus O’Regan? Le gouvernement a consacré 180 000 $ pour le défendre dans une poursuite en diffamation. Les sénateurs se souviennent-ils de Hunter Tootoo? Il a malheureusement dû quitter le Cabinet pour régler des problèmes de dépendance, mais ce qui est étrange, c’est qu’il a déclaré que Justin Trudeau lui avait fait une accolade après qu’il eût admis avoir eu une relation inappropriée avec une employée. On a découvert que Harjit Sajjan avait menti au sujet de son rôle en Afghanistan.

Néanmoins, cette joyeuse bande sait comment organiser une fête — pardon, une retraite du Cabinet. Les trois retraites sur l’accessibilité organisées à Charlottetown, à Vancouver et à Hamilton, entre 2022 et août 2023, ont coûté 1 325 000 $. La vie est plus belle avec du homard et du vin blanc, surtout quand il s’agit de discuter d’abordabilité.

Il n’est pas étonnant de constater tous ces manquements à l’éthique. Après tout, c’est le chef d’une organisation qui donne le ton. Justin Trudeau ne croit pas que les règles d’éthique s’appliquent à lui. Dès lors, comment pourrait-il exiger que ses fonctionnaires, ses députés et ses ministres fassent mieux?

En 2015, on apprenait que Justin Trudeau recevait des honoraires d’organismes de charité à titre de conférencier alors qu’il était député. C’était une première, chers collègues; un politicien élu qui exige d’être payé pour prononcer des discours. Quand il s’est fait prendre, il a dit qu’il s’excusait et il a fait un chèque.

Quelques semaines plus tard, il s’est de nouveau fait prendre. Cette fois, il avait demandé à la Chambre des communes de couvrir des frais qui lui avaient déjà été remboursés par l’organisme qui l’avait engagé comme conférencier. On avait encore eu droit à la même rengaine : « Je suis désolé; voici un chèque. » C’était un avant-goût de ce qui allait se passer.

Qui peut oublier le commentaire et l’incident « Merci de votre don », qui a bien mis en évidence l’élitisme et la condescendance du premier ministre lorsqu’il s’est moqué d’une manifestante autochtone?

Avant cela, il y a eu le fameux coup de coude que Justin Trudeau a donné à la députée Ruth Ellen Brosseau parce qu’il était pressé de passer au vote. Son temps était plus précieux que celui des autres, et le faux féministe qui est actuellement premier ministre n’hésite pas à écarter les femmes qui se mettent en travers de sa route.

C’est le même genre de comportement qu’avait adopté Justin Trudeau lors du tripotage de Kokanee, lorsqu’il avait touché de façon inappropriée une journaliste. Il avait ensuite affirmé : « Oh là là, si j’avais su que cette femme était une journaliste d’envergure nationale, je n’aurais pas fait cela. » J’imagine que, pour lui, cela aurait été plus acceptable si cette femme n’avait pas été une journaliste d’envergure nationale. Tout le monde se rappelle que le premier ministre avait alors conclu qu’il s’agissait d’une leçon pour nous tous. Nous savons maintenant que « les gens vivent les choses différemment », comme il l’a dit.

N’oublions pas les trois, quatre, cinq fois, ou plus, où Justin Trudeau était grimé en Noir, parce qu’il croyait que c’était amusant de faire semblant d’être Noir. Nous ne savons pas combien de fois il l’a fait, parce que lui-même ne s’en souvient pas. Il semble que c’était une habitude pour Justin Trudeau, l’acteur, d’être grimé en Noir. Qu’est-ce que cela nous dit sur la véritable nature de Justin Trudeau?

Une chose est sûre : nous savons qu’il aime voyager. De plus, ses voyages lui causent parfois des problèmes avec ses hôtes internationaux, ils sont souvent contraires à l’éthique et ils coûtent toujours très cher aux contribuables canadiens.

Il y a évidemment ses vacances dans l’île de l’Aga Khan et son séjour d’une valeur de 80 000 $ par semaine dans un centre de villégiature en Jamaïque. Justin Trudeau prend toujours des vacances en première classe, et toujours aux frais de quelqu’un d’autre.

L’an dernier, pendant la période des Fêtes, la famille Trudeau a profité d’un séjour d’une valeur de 9 300 $ la nuit dans une villa de 5 000 pieds carrés avec 6 chambres à coucher, une piscine privée, un bain à remous, des valets de chambre, un domestique et un chef cuisinier. Après avoir dit initialement aux médias que M. Trudeau allait payer de sa poche pour ses vacances familiales en Jamaïque pendant la période des Fêtes, le Cabinet du premier ministre a admis que M. Trudeau et sa famille avaient plutôt séjourné en Jamaïque sans frais, ce qui témoigne, encore une fois, de cette habitude de mentir à la population.

L’arrogance de M. Trudeau était bien visible lorsqu’il a donné cette explication avec un sourire narquois : « Comme énormément de familles canadiennes, on est allés rester chez des amis pour les vacances de Noël. »

J’ai moi aussi passé un jour ou deux avec des amis pendant la période des Fêtes. Je pense que nous avons commandé du poulet.

M. Trudeau ne se sert pas seulement de ses relations fortunées pour trouver un endroit où passer ses vacances dans le Sud. Il peut loger dans la maison d’une millionnaire de Calgary au bord de l’océan lorsqu’il veut faire du surf à Tofino, en Colombie-Britannique, ce qui lui permet de s’évader et surtout de s’éviter une rencontre avec les Autochtones qui l’ont invité à célébrer avec eux la toute première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.

Le premier ministre n’est pas seulement amateur de sports nautiques. Son voyage de ski de 4 jours au Montana l’année dernière a coûté 230 000 $ aux contribuables. Je ne dis pas que le premier ministre n’a pas le droit d’aller en vacances avec sa famille — tout le monde aime aller en vacances en famille —, mais je n’ai pas souvenir que les premiers ministres Mulroney, Chrétien, Martin ou Harper aient visité des îles appartenant à des milliardaires lorsqu’ils étaient au pouvoir. La plupart du temps, ils passaient leurs semaines de relâche au lac Harrington. C’est logique pour un premier ministre d’aller en vacances là-bas. C’est près d’Ottawa et toute la sécurité a déjà été pensée, un peu comme à Camp David aux États-Unis.

Le gouvernement a décidé de dépenser jusqu’à 11 millions de dollars pour rénover les installations au lac Harrington, notamment pour déplacer la maison d’invités plus près du lac. Pourtant, Justin Trudeau n’utilise pas les installations au lac Harrington. Pourquoi?

Les sénateurs se souviendront certainement de la prestation donnée par Justin Trudeau à son hôtel de luxe lors des funérailles de la reine Elizabeth. Il avait chanté du Queen à l’hôtel où il logeait dans une suite à 6 000 $ la nuit, valet de chambre inclus. Vous souvenez-vous que le sénateur Gold refusait de dire qui avait dormi dans la suite? C’est grâce à une erreur d’un membre du personnel politique que nous avons appris ce que nous savions déjà : c’est Justin Trudeau qui dormait dans cette chambre. Il a dépensé 61 000 $ pour participer à un sommet en compagnie d’artistes de l’industrie du divertissement pour discuter — écoutez bien — de lutte contre la pauvreté. Si on peut dépenser 1,3 million de dollars pour parler d’abordabilité, on peut bien dépenser au moins 60 000 $ pour parler de pauvreté.

Le voyage de Justin Trudeau en Inde en 2018 a été un véritable désastre. Il était accompagné de son propre chef indien en Inde. Je suppose qu’il n’y en avait pas là-bas. Il a invité un terroriste à participer au voyage. Il s’est ridiculisé non seulement en se déguisant, mais aussi en tentant d’être plus bollywoodien que les vedettes de Bollywood. Il a, à lui seul, causé une division entre le Canada et l’Inde, l’un des pays les plus peuplés de la planète.

Un aspect de l’héritage de Justin Trudeau que nous devrons examiner en profondeur est pourquoi la communauté chinoise de Vancouver a financé ses campagnes à Montréal pendant des années?

En outre, il y a beaucoup à apprendre sur les tractations qui ont eu lieu à la fondation Trudeau. Cet organisme secret et nébuleux a reçu 100 millions de dollars de Jean Chrétien. On pourrait penser que c’était suffisant pour que la petite clique d’élitistes puisse faire tout ce qu’elle voulait faire, mais non. Ils ont accepté des dons de personnages douteux. Espérons qu’un nouveau gouvernement fera ce qu’il peut afin de découvrir la vérité sur cet organisme pour les Canadiens.

(1600)

Chers collègues, une chose est claire au sujet de Justin Trudeau. Ce premier ministre a été reconnu coupable d’avoir enfreint la Loi sur les conflits d’intérêts si souvent que nous en avons perdu le compte. La commissaire à l’éthique a recommandé que le premier ministre et tous les membres de son Cabinet reçoivent une mise à jour spéciale sur ce qu’est la conduite éthique et sur ce qui se trouve dans le Code. Bien sûr, les libéraux se croient au-dessus des lois. Comme les règles sont faites pour les autres, ils ont fait fi de la recommandation de la commissaire.

Chers collègues, je suis loin d’avoir terminé la liste des inconduites et des manquements à l’éthique commis par le premier ministre, son Cabinet et d’autres députés de son parti, mais même si je dispose d’un temps illimité, je vais m’arrêter ici parce que je pense que vous comprenez où je veux en venir.

Une voix : Oh, non!

Le sénateur Plett : Toutefois, je tiens à souligner que tous ces faits sont connus parce que certains journalistes et l’opposition conservatrice ont travaillé sans relâche pour découvrir la vérité.

Le gouvernement Trudeau a mis au point ce que la commissaire à l’information a qualifié de culture du secret. Les sénateurs peuvent en avoir un aperçu ici même, au Sénat, quand le gouvernement refuse systématiquement de répondre aux questions qu’il juge dérangeantes. Les Canadiens considèrent maintenant que la coalition néo-démocrate—libérale est une coûteuse coalition de camouflage, puisque le NPD se joint constamment aux libéraux pour faire obstacle aux comités de l’autre endroit quand leurs travaux visent à enquêter sur la corruption libérale.

Ici, au Sénat, l’opposition conservatrice a réussi — même si nous sommes en forte infériorité numérique — à faire la lumière sur une partie de toute cette corruption libérale. Je soupçonne que c’est en raison de notre redoutable efficacité que le gouvernement est en train de concocter un stratagème pour modifier unilatéralement le Règlement du Sénat de manière à réduire les pouvoirs de l’opposition. Ils sont tellement fatigués de nous voir exposer la vérité qu’ils se disent qu’ils doivent y faire quelque chose.

Donc, chers collègues, je vous invite à vous préparer à cette éventualité, parce que c’est ce que le leader du gouvernement nous amène à croire : « Nous allons enlever le pouvoir de l’opposition. Nous allons supprimer les droits de l’opposition. Nous allons donner les droits que vous avez à des gens qui ne défendent rien. » Les conservateurs défendent ardemment les intérêts des 6 millions d’électeurs qui ont voté pour eux lors de la plus récente campagne électorale. Nous allons continuer de faire notre travail.

On se souviendra de Justin Trudeau comme d’un premier ministre qui a enfreint le code d’éthique à plusieurs reprises. On se souviendra qu’il a dirigé un gouvernement qui considérait les règles d’éthique comme de simples suggestions pouvant être écartées au profit de ce qu’il pensait être l’intérêt collectif.

Permettez-moi de citer le premier ministre une fois de plus :

C’est vraiment moche en ce moment. Tout est moche pour les gens, même au Canada. Nous sommes censés être gentils et polis mais, bon sang, les gens sont furieux.

Voilà ce qu’il a déclaré pendant un voyage à New York, l’automne dernier. Oui, monsieur le premier ministre, les gens sont furieux. Ils sont furieux que vous ayez l’audace de nous faire la leçon alors que vous montrez un mépris total des règles. Ils sont furieux que des gestes apparemment vertueux vous donnent un passe-droit en matière d’éthique. Justin Trudeau, vous n’en valez pas le coût.

Quand Harry Truman était président des États-Unis, une plaque sur son bureau disait : « La responsabilité commence ici. » Chers collègues, Justin Trudeau n’est pas de la même trempe que Harry Truman. Il essaie de rejeter la faute sur tout et sur tout le monde. Les libéraux cherchent toujours à esquiver, à brouiller les pistes et à mentir pour dissimuler leurs manquements à l’éthique. C’est une chose de plus qui rend les Canadiens furieux.

Justin Trudeau quittera bientôt son poste de premier ministre, soit parce qu’il fera enfin ce qui s’impose en se retirant, soit parce que les Canadiens voteront pour qu’il soit démis de ses fonctions. Une chose est sûre : ces scandales feront partie de son héritage. Les Canadiens se tourneront vers Pierre Poilievre et les conservateurs guidés par le gros bon sens pour que l’intégrité et l’éthique reviennent au sein du gouvernement et au pays.

Une voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Chers collègues, j’ai l’intention de reparler plus longuement de l’héritage que laissera Justin Trudeau. Là‑dessus, je propose l’ajournement du débat pour le temps de parole qu’il me reste. Merci, chers collègues.

(Sur la motion du sénateur Plett, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur la Semaine d’appréciation de la fonction de juré

Troisième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Lucie Moncion propose que le projet de loi S-252, Loi instituant la Semaine d’appréciation de la fonction de juré, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture en tant que marraine du projet de loi S-252, Loi instituant la Semaine d’appréciation de la fonction de juré.

Le projet de loi S-252 propose de souligner chaque année au Canada la Semaine d’appréciation de la fonction de juré pendant la deuxième semaine de mai.

Au cours des dernières années, j’ai eu le privilège de m’exprimer à quelques reprises dans cette enceinte en faveur de la reconnaissance de la fonction de juré au Canada. J’ai notamment présenté une motion pour demander au gouvernement fédéral d’instituer une Semaine d’appréciation du jury au Canada, qui a été adoptée par le Sénat le 12 mai 2022. J’ai également été porte-parole pour le projet de loi S-206, parrainé par le sénateur Boisvenu, qui a permis de lever la règle du secret du délibéré dans des cas bien précis, en permettant aux jurés de s’entretenir avec un professionnel de la santé mentale au sujet des délibérations après un procès. Ce projet de loi a été adopté et a reçu la sanction royale en 2022. Ces interventions m’ont permis de lever le voile sur une situation problématique qui était auparavant peu connue des parlementaires.

Comme sénateurs, nous avons le privilège de proposer des projets de loi pour instaurer des journées ou des semaines nationales. Bien que parfois critiquée pour sa portée symbolique, cette voie permet de combler certaines lacunes en suscitant un dialogue national sur des enjeux importants, mais méconnus des gouvernements et des Canadiens.

Une telle semaine offre l’occasion d’atteindre plusieurs objectifs. En plus de promouvoir la reconnaissance, l’éducation et la sensibilisation des Canadiens et Canadiennes à l’exercice de ce devoir civique, une semaine nationale consacrée à l’appréciation du rôle des jurés permet de faciliter la collaboration et la coordination, par les organismes, tribunaux et gouvernements provinciaux et territoriaux, dans la mise en œuvre des recommandations du rapport de 2018 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes, intitulé Mieux soutenir les jurés au Canada. Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a fait des observations sur le projet de loi et une semaine nationale permettrait également de se pencher sur ces observations.

Pourquoi le projet de loi propose-t-il la deuxième semaine de mai comme semaine d’appréciation de la fonction de juré? C’est une question qui m’a été posée au comité; je me permets donc d’y répondre aussi dans cette Chambre pour expliquer ce choix.

Le printemps marque la fin de nombreux procès, ce qui en fait un moment opportun pour exprimer notre gratitude envers les jurés et pour reconnaître leur contribution au système judiciaire. La fin des procès est également une occasion de mieux faire connaître aux jurés le soutien qui leur est offert.

(1610)

Aux États-Unis, la deuxième semaine de mai correspond à la reconnaissance d’une telle semaine par l’American Bar Association et diverses administrations, notamment la Californie et la Louisiane. De plus, les tribunaux de l’ensemble des États-Unis, ainsi que les législatures du Texas et de l’Oregon et le Sénat de l’État de Pennsylvanie observent une semaine consacrée à l’honneur des jurés au mois de mai.

Au Canada, la deuxième semaine de mai est reconnue comme une semaine de reconnaissance depuis déjà deux ans par diverses parties prenantes et par le gouvernement fédéral, par le biais du ministre de la Justice. Le Sénat a reconnu la semaine en question lors de l’adoption d’une motion le 12 mai 2022. Vous comprendrez, chers collègues, qu’il serait inefficace de présenter une telle motion chaque année. Ces reconnaissances n’ont pas d’assises dans la législation et n’offrent donc pas de certitude à long terme pour les acteurs impliqués et touchés par cette cause. On parle ici de milliers de Canadiens et de Canadiennes chaque année.

Le projet de loi S-252 n’est pas uniquement axé sur la reconnaissance symbolique du devoir de juré. Nous savons que le fait d’enraciner dans la législation une semaine officielle peut être un catalyseur de changements, et ce, de plusieurs manières. Le préambule du projet de loi nous permet de comprendre son objet, mais aussi de se projeter dans l’avenir pour comprendre la portée potentielle de la proposition. Le préambule reconnaît que des milliers de Canadiens et de Canadiennes exercent chaque année la fonction de juré et que ce devoir constitue un élément crucial de notre système de justice et de notre démocratie. La valorisation du devoir de juré pourrait cultiver un sentiment de fierté et d’accomplissement, ce qui aiderait les jurés à sentir que leurs sacrifices sont vus et reconnus par le gouvernement et le système judiciaire.

Le préambule attire également l’attention sur le lien entre le bien‑être et la santé mentale des jurés pour ce qui est du fonctionnement efficace de notre système de justice. Cet élément me tient beaucoup à cœur, car j’ai moi-même souffert du syndrome de stress post‑traumatique en raison de mon expérience comme jurée. Des mesures concrètes doivent être mises en place pour soutenir les jurés avant, pendant et après leur service. Mieux informer et préparer les jurés avant le procès pourrait faire une énorme différence dans leur capacité à vivre sereinement cette responsabilité. Tout cela passe par une communication claire et transparente sur le déroulement du procès, les règles à respecter et les différents types de cas qu’ils peuvent être amenés à traiter.

Lorsque des citoyens sont appelés à siéger comme jurés, ils se retrouvent souvent plongés dans l’inconnu. Un simple avis leur ordonne de se présenter au tribunal, sous peine d’une amende de 5 000 $ ou d’une peine de prison, sans aucune information sur ce qui les attend. Confrontés à un système complexe et à des émotions fortes, ils manquent souvent de préparation pour gérer le stress et l’impact psychologique de cette expérience. Le besoin de soutien ne s’arrête pas à la fin du procès. Les jurés peuvent avoir besoin de temps pour digérer les témoignages et le verdict et pour parler de leur expérience avec d’autres personnes ayant vécu la même chose, ainsi qu’à des professionnels de la santé mentale au besoin.

Il est essentiel de mieux accompagner les jurés tout au long du processus, et ce, dès la convocation. Une semaine officielle célébrée chaque année permettrait de mettre en lumière l’interrelation entre le bien-être des jurés et le bon fonctionnement du système de justice canadien, afin que certains acteurs clés comprennent bien la nature de ce lien.

Enfin, le préambule précise que cette loi servira de projet éducatif, visant à informer et à mobiliser les citoyens, les organismes, l’ensemble de l’appareil judiciaire ainsi que les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral, en favorisant la sensibilisation et la compréhension des complexités associées à l’accomplissement de ce devoir civique. Une initiative visant à célébrer cette semaine à l’échelle nationale permet de remédier aux fragmentations de notre système actuel, qui favorise les discussions en silos entre divers organismes et les provinces et territoires pour ce qui est de l’administration de la justice, mais aussi en matière d’offre de services en santé mentale. Tout en respectant les compétences des provinces et des territoires, le projet de loi permet de jeter les bases d’un fédéralisme coopératif en matière de soutien aux jurés et fait le pont entre une variété d’acteurs de la société civile qui œuvrent dans des domaines liés à la justice, à l’éducation et à la santé.

[Traduction]

Pour combler les lacunes en matière de soutien aux jurés, une semaine consacrée à l’appréciation de la fonction de juré pourrait grandement améliorer l’expérience des jurés à de multiples égards. S’inspirant des récits d’anciens jurés et de mes propres observations, les exemples suivants mettent en lumière les principaux besoins auxquels une telle semaine pourrait répondre.

Être juré peut s’avérer une expérience psychologiquement difficile, voire entraîner des symptômes du trouble de stress post‑traumatique. Les jurés et leur famille sont confrontés à diverses pressions, et les répercussions de la participation à un jury peuvent se faire sentir longtemps après la fin du procès.

Le manque de soutien financier, en particulier pour les personnes à faible revenu, est un facteur de stress majeur qui nuit à la représentation et à la diversité des jurys canadiens. La rémunération des jurés est actuellement inférieure au salaire minimum. En Ontario, par exemple, un juré reçoit 5 $ l’heure, ce qui ne compense pas la perte de revenu occasionnée par la participation au système de justice. Le manque de soutien financier peut rendre difficile la participation des personnes à faible revenu aux jurys et conduire à un manque de diversité dans le processus de sélection des jurés.

Les employeurs sous-estiment souvent les difficultés rencontrées par les employés appelés à faire partie d’un jury. Le soutien et l’indemnisation fournis par les employeurs, les provinces et les territoires sont le plus souvent négligeables et insuffisants. Le manque de soutien peut rendre difficile la participation des employés à des jurys et conduire à des difficultés financières et à la perte d’un emploi.

Enfin, après un procès, la société s’attend à ce que les jurés reprennent leur vie normale comme si rien ne s’était passé. Les employeurs perçoivent souvent cette absence prolongée comme des vacances. Il est essentiel d’informer les employeurs, en particulier. Les employeurs doivent être sensibilisés aux défis auxquels sont confrontés les jurés et ils doivent être prêts à soutenir leurs employés qui sont appelés à faire partie d’un jury.

Il est impératif de contrer ces attentes irréalistes et d’entamer des discussions sur l’élimination de ces obstacles afin de créer un système de jury plus inclusif et plus équitable. Il est essentiel de soutenir le bien-être de ceux qui font des sacrifices pour assurer le bon fonctionnement du système judiciaire et de la démocratie au Canada. Il faut notamment fournir un soutien financier adéquat, garantir la sécurité d’emploi et offrir aux jurés des ressources en matière de santé mentale.

[Français]

Le projet de loi S-252 représente la pierre angulaire de la création d’un environnement favorable à la réalisation de ces objectifs.

À la suite de mon expérience comme jurée numéro un dans un procès pour meurtre au premier degré, de conversations engagées avec d’anciens jurés et intervenants, de réflexions fournies par nos comités parlementaires, j’en suis venue à la conclusion qu’un leadership à l’échelle fédérale est nécessaire. Il y a un réel écart à combler sur le plan national.

Je vais maintenant aborder brièvement le rôle du gouvernement fédéral en ce qui concerne la fonction de juré. Le manque de leadership à l’échelon fédéral explique en partie une offre fragmentée et incohérente de services et de soutiens aux jurés. Ce manque explique également l’absence de reconnaissance pour ce qui est de l’apport à la justice et à la démocratie canadienne du rôle de juré.

La justice est une compétence partagée. Le rôle du gouvernement fédéral et du ministère de la Justice est central dans chacune des recommandations contenues dans le rapport de 2018 intitulé Mieux soutenir les jurés au Canada. Tout cela est aussi cohérent avec l’objet du projet de loi S-252.

À titre illustratif, le rapport recommande un financement fédéral à certains égards et le partage de bonnes pratiques avec les provinces et les territoires. Il souligne également l’importance de sensibiliser les juges, les coroners et les fonctionnaires judiciaires aux répercussions potentielles des procédures judiciaires sur la santé mentale des jurés.

[Traduction]

Bien que la fonction de juré soit une fonction vitale de notre système judiciaire et de notre démocratie, le gouvernement fédéral n’a pas encore joué un rôle de premier plan dans le soutien aux jurés. Le projet de loi propose un moyen efficace pour le gouvernement fédéral de combler cette lacune, tout en respectant l’administration provinciale et territoriale de la justice.

J’ai eu le privilège de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie dans le cadre de son étude du projet de loi S-252. Les membres du comité ont écouté mon témoignage avec attention et compassion. Je leur suis très reconnaissante de leur gentillesse et de leur considération.

Les membres du comité ont non seulement fait preuve d’une grande sensibilité à mon égard et à l’égard des autres témoins, mais ils ont également adopté une approche pragmatique et analytique pour examiner ces questions. Le rapport du comité ne contient pas d’amendements, mais il renferme trois observations constructives.

(1620)

La première observation concerne le manque de diversité au sein des jurys au Canada, notamment en ce qui concerne la représentation des personnes racisées, noires et autochtones. Le comité recommande donc que les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et autochtones tentent de déterminer des mesures qui amélioreront la diversité des jurys afin que les accusés puissent être jugés par des pairs.

La deuxième observation concerne le traumatisme vicariant subi par les jurés, ainsi que les programmes et services de santé mentale. Selon la définition de Santé Canada :

On subit un traumatisme vicariant en ressentant le témoignage d’atrocités commises à l’endroit d’une autre personne. Par empathie, on voit, sent, entend, touche et ressent la même chose que la victime, en écoutant celle-ci raconter ses expériences en détail, dans le but d’atténuer sa propre douleur. […] Le traumatisme est lié à l’énergie qui se dégage de l’exposition au récit d’événements traumatiques et à la manière dont le corps et l’âme réagissent à la rage, à la douleur et au désespoir profonds.

J’aurais aimé connaître la notion de traumatisme vicariant lorsque je vivais des moments difficiles à la suite de mon expérience comme jurée. Cela m’aurait aidé à comprendre que mes sentiments étaient à la fois normaux et valables, et je suis sûre que c’est le cas pour beaucoup d’autres anciens jurés. Comprendre les fondements scientifiques de notre expérience pourrait favoriser grandement notre rétablissement, et il est essentiel d’avoir accès à des programmes fondés sur des données probantes.

Par rapport à cette seconde observation, le comité exprime sa préoccupation concernant les mesures insuffisantes de soutien en santé mentale offertes aux jurés avant, pendant et après un procès. Par conséquent, il recommande la création de programmes gouvernementaux complets axés sur la gestion des traumatismes afin de soutenir et de protéger le bien-être des jurés.

La troisième observation souligne les répercussions financières des fonctions de juré sur les Canadiens qui les exercent, notamment la perte de salaire, mais également l’indemnisation inadéquate des dépenses liées à l’exercice de fonctions de juré, dont les frais de garde d’enfants et de déplacement. Ces obstacles financiers expliquent en partie le manque de diversité au sein des jurys. En réponse, le comité propose que le gouvernement du Canada envisage d’utiliser le programme d’assurance-emploi pour offrir un soutien financier aux jurés pendant leur service.

Au sujet de la compensation financière, Tina Daenzer, ancienne jurée ayant témoigné devant le comité, a fourni l’explication suivante :

La rémunération des jurés est encore nettement insuffisante pour former un jury vraiment équilibré. À vrai dire, en Ontario, les montants n’ont pas changé depuis ma participation au procès de Paul Bernardo en 1995. Les 10 premiers jours ne sont pas rémunérés, puis on commence à toucher 40 $ par jour.

Elle a été jurée en 1995. Je l’ai été en 1989, et les mêmes règles s’appliquaient à l’époque.

Des millions de Canadiens occupent des emplois au salaire minimum ou sont des travailleurs indépendants, ce qui signifie qu’ils sont financièrement incapables de faire partie d’un jury. Si nous voulons vraiment former des jurys de pairs, nous devons veiller à ce que chaque Canadien puisse en faire partie.

Les anciens jurés et les autres témoins entendus par le comité ont été unanimes à dire que cette semaine d’appréciation est nécessaire non seulement pour sensibiliser la population, mais aussi pour reconnaître et célébrer les personnes qui ont exercé cette fonction. Une semaine nationale donnerait aux gens l’occasion de s’engager dans une réflexion et des discussions approfondies sur les observations formulées par le Comité des affaires sociales et les recommandations incluses dans le rapport du Comité de la justice de l’autre endroit, qui date maintenant de six ans.

Le Sénat a déjà voté en faveur d’une motion visant à reconnaître la Semaine d’appréciation de la fonction de juré. J’espère, chers collègues, pouvoir compter sur votre appui pour cette proposition législative modeste et simple. L’adoption du projet de loi S-252 par le Parlement illustrerait la portée et l’importance des contributions des citoyens qui exercent la fonction de juré. Cette reconnaissance témoignerait de notre gratitude pour les sacrifices qu’ils font et du rôle important qu’ils jouent pour assurer le bon fonctionnement de notre système de justice.

J’aimerais citer à nouveau Tina Daenzer, cette fois au sujet du manque de reconnaissance de la société canadienne envers les jurés. Lors de son témoignage devant le Comité des affaires sociales sur le projet de loi S-252, elle a dit :

Si la fonction de juré est si importante pour l’ensemble de notre système juridique, pourquoi les personnes sélectionnées souffrent-elles d’un tel manque de reconnaissance, tant sur le plan de la rémunération que sur celui de la santé mentale? De nombreuses études ont montré que la reconnaissance en milieu de travail stimule l’engagement, attire de meilleurs employés, aide le personnel à trouver un sens à son travail et renforce les aspects positifs. Dans notre pays, nous devrions tous souhaiter ces bienfaits, non seulement pour les employés, mais aussi pour les personnes choisies comme jurés. Nous devons veiller à ce qu’ils se sentent soutenus et valorisés et que, à la fin du procès, ils puissent repartir avec le sentiment d’avoir vécu une expérience gratifiante et enrichissante.

Je vais dévier de mon discours un instant. C’est probablement la dernière fois que je vais parler de mon expérience en tant que juré, alors je vais vous raconter une histoire.

Au cours des 35 dernières années, j’ai toujours craint que les personnes reconnues coupables ne sortent un jour de prison et s’en prennent à moi ou à un autre membre du jury. C’était une de mes préoccupations. L’autre préoccupation que j’avais en tant que juré concernait le verdict de meurtre au premier degré que nous avons rendu. Il y a toujours eu un doute dans mon esprit — pas parce que nous n’avions pas les preuves adéquates, mais parce que j’ai toujours craint d’avoir commis une erreur ou d’avoir rendu un verdict erroné.

Il y a quelque temps, j’ai décidé de chercher dans Google le nom des deux condamnés et j’en ai trouvé un. Cet homme est sorti de prison depuis 2014. Il a maintenant 62 ans. C’est un détenu réadapté. Dans la séquence vidéo que j’ai regardée, il parle de sa vie de détenu. Non seulement il a confirmé qu’il avait tué la personne qui faisait l’objet du procès auquel nous avions siégé comme jurés quand il a été reconnu coupable la première fois, mais il a également tué à nouveau pendant qu’il était en prison.

Aujourd’hui, j’ai pu constater d’après son témoignage que cet homme est réadapté. Comme je l’ai dit, il a 62 ans. Il vit quelque part au Canada. C’est un grand-père et il est réadapté. Il a écrit un livre. Il se rend dans des écoles pour témoigner et parler aux jeunes de son expérience. Il raconte comment il est devenu un détenu, comment il s’est retrouvé dans la situation qu’il a connue, ce qui lui est arrivé en prison pour qu’il change sa façon de penser, et il dit qu’il a développé de l’empathie pendant qu’il était en prison. Il a commencé à comprendre que tout ce qu’il faisait avait des conséquences sur les autres.

Cet homme est maintenant réadapté. Il a un emploi. Il fait partie de notre société. Après avoir lu cela, j’ai dit à mon mari : « J’ai vu cela. » Il a dit : « Es-tu en train de me dire que tu lui pardonnes pour ce qu’il a fait? » Je lui ai répondu : « Je ne sais pas si je lui pardonne, et je ne sais pas non plus ce que je ressens maintenant au sujet de cet homme. » Mais j’ai toujours voulu m’assurer que quelque chose de bon est ressorti du travail que j’ai fait il y a 35 ans. J’ai seulement cherché le nom de cette personne sur Google, alors je n’ai pu trouver que des renseignements à son sujet. Cet homme a aussi écrit un livre.

Ce n’est qu’une anecdote. À mes yeux, c’est comme boucler la boucle à ce sujet. Je ne sais toujours pas ce que je ressens au sujet de cet homme, ni où il en est dans sa vie aujourd’hui. Une des choses qu’il a dites, c’est qu’il n’est pas fier de ce qu’il a fait. Il a été incarcéré pendant 32 ans, mais il a dit : « Je vis toujours dans ma propre prison, car je vis toujours avec ce que j’ai fait, et cela qui me suivra jusqu’à ma mort. »

[Français]

Sur cette note, je rappelle que, en appuyant le projet de loi S-252, nous sensibiliserons chaque année les Canadiennes et Canadiens ainsi que les gouvernements aux nombreux enjeux liés à la fonction de juré.

(1630)

Vous comprendrez, bien évidemment, que le temps presse pour que ce projet de loi soit renvoyé à la Chambre des communes. Je demande donc bien humblement votre appui pour que ce projet de loi puisse rapidement franchir les étapes à l’autre endroit.

Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

L’honorable Jane Cordy : Acceptez-vous de répondre à une question?

Je tiens vraiment à vous remercier de faire cela. J’étais membre du comité des affaires sociales et je me souviens d’avoir appris que votre projet de loi allait être présenté, et que c’était la Semaine d’appréciation de la fonction de juré, et j’ai pensé : « Oh, c’est super. » Puis, vous avez été le premier témoin et vous avez parlé de votre expérience, de ce qui s’est passé par la suite et du fait qu’on ne vous avait pas préparée en amont. Puis, le lendemain du procès, vous avez repris une vie normale, une vie aussi normale que possible après avoir vécu un tel traumatisme.

Je pense que vous avez parlé du manque d’appréciation de la fonction de juré. J’ai connu des personnes qui ont fait partie de jurys. On les revoit, et c’est bien qu’ils aient terminé, mais ils ne peuvent pas parler de ce qu’ils ont vécu. Ce n’est même pas correct de leur demander ce qu’ils ont traversé.

Ma question est la suivante. Pendant la Semaine d’appréciation de la fonction de juré — qui, à mon avis, sera très bénéfique — quels types d’activités envisagez-vous pour que les Canadiens comprennent ce que les jurés ont enduré? On pense souvent qu’un procès dure une semaine ou deux, mais nous avons entendu un témoin nous dire que le procès avait duré des mois et des mois. Après quoi, au lendemain du procès, il avait dû retourner à son bureau et continuer comme si la vie avait été « normale » pendant les six ou neuf mois précédents.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples de ce que vous envisagez? J’espère que les gens feront preuve de créativité si le projet de loi est adopté. Pouvez-vous nous dire ce qui pourrait se passer pour aider les jurés ou les jurés potentiels à comprendre ce qui va se passer, mais aussi pour aider le grand public à mieux comprendre le rôle que les membres d’un jury jouent dans la société?

La sénatrice Moncion : Je vous remercie de votre question, sénatrice, et de toutes les bonnes questions que vous et tous vos collègues du Comité des affaires sociales, de la science et de la technologie avez posées lorsque nous, les témoins, avons assisté à la réunion.

Beaucoup de choses sont déjà en cours, et elles ont été utilisées l’année dernière lors de la Semaine d’appréciation de la fonction de juré. Le contenu est élaboré au fur et à mesure que les différentes provinces s’inscrivent au programme. Depuis que nous avons commencé à travailler sur la modification de la loi en ce qui concerne les règles de confidentialité, la Commission canadienne des jurés a été créée, et son travail consiste à sensibiliser les gens au travail que les jurés doivent accomplir.

La commission travaille avec les provinces qui souhaitent adhérer à l’initiative. Il y a des renseignements qui sont disponibles sur le Web. Il existe toutes sortes de cours que les gens peuvent suivre ou de sessions auxquelles ils peuvent participer pour se préparer à être jurés. Il y a différentes choses qui se font dans les différentes provinces.

Diverses mesures ont été prises dans les dernières années, et il y a donc de plus en plus d’information accessible. On fournira plus d’information à l’employeur lorsqu’un membre de son personnel sera convoqué comme juré. On fournit toute l’information nécessaire pour comprendre les obligations de l’employeur, le travail que le juré devra faire et à quel point ce travail prend du temps. On facilitera également l’accès à cette information.

La semaine d’appréciation vise seulement à faire de la sensibilisation. Ainsi, les gens commenceront peut-être à s’informer pour savoir ce qui se passe lorsqu’on est convoqué comme juré. Il y aura plus de renseignements accessibles, et toutes sortes d’outils sont maintenant en place pour aider les jurés.

Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

La Loi sur l’Agence du revenu du Canada

Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Downe, appuyée par l’honorable sénateur Quinn, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-258, Loi modifiant la Loi sur l’Agence du revenu du Canada (rapports concernant l’impôt sur le revenu impayé).

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

La Loi sur le casier judiciaire

Déclaration d’intérêts personnels

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous informe que l’honorable sénatrice Anderson vient de faire une déclaration d’intérêts personnels concernant le projet de loi S-212 et que, conformément à l’article 15-7, cette déclaration sera consignée aux Journaux du Sénat.

Projet de loi favorisant l’identification de criminels par l’ADN

Projet de loi modificatif—Vingt-deuxième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du vingt-deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-231, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le casier judiciaire, la Loi sur la défense nationale et la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques, avec des amendements), présenté au Sénat le 12 décembre 2023.

L’honorable Brent Cotter propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de présenter au Sénat le rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles sur le projet de loi S-231, dont l’étude par le comité a commencé avant le 13 décembre 2023. Notre rapport est arrivé au Sénat le 13 décembre 2023. Je n’ai qu’un bref discours à prononcer maintenant en ce qui concerne le rapport du comité. Je tiens à remercier la sénatrice Jaffer, présidente du comité, de m’avoir offert cette occasion.

Le projet de loi, parrainé par le sénateur Carignan, est intitulé « Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le casier judiciaire, la Loi sur la défense nationale et la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques. » Le titre abrégé du projet de loi, qui évoque mieux son but, est « Loi favorisant l’identification de criminels par l’ADN ».

De façon générale, le projet de loi propose des mesures législatives visant à modifier une série de lois — les lois que je viens de mentionner — afin que le prélèvement de l’ADN des personnes reconnues coupables d’infractions criminelles graves et les personnes déclarées non coupables pour cause de troubles mentaux soit élargi pour ce qui est des catégories de personnes et d’infractions où l’ADN peut être prélevé et placé dans la banque de données génétiques.

En outre, le projet de loi élargirait, dans des circonstances limitées, la capacité des services de police chargés d’enquête d’obtenir des renseignements liés aux enquêtes en cours dans ce que l’on appelle la recherche de liens de parenté. Il s’agit des cas où il n’y a pas de correspondance directe entre l’ADN trouvé dans une enquête et une personne dont les empreintes génétiques sont dans la banque de données, mais où une correspondance existe avec une personne ayant un lien génétique avec la personne dont l’ADN est en banque. C’est ce qu’on appelle la recherche des liens de parenté. Le projet de loi a été considérablement amendé par le comité. Je vais souligner ces amendements dans un instant.

(1640)

Le comité s’est réuni à quatre reprises pour examiner le projet de loi, à partir du 9 novembre 2023. Une réunion du comité pour l’étude article par article a eu lieu le 7 décembre 2023.

Trois amendements proposés par le comité ont été adoptés et quatre articles du projet de loi ont été rejetés. Les principales modifications apportées au projet de loi S-231 sont les suivantes :

Tout d’abord, l’article 3 du projet de loi concernant les ordonnances obligatoires en matière d’analyse génétique a été rejeté.

À l’heure actuelle, le Code criminel exige que la partie défenderesse fournisse un échantillon d’ADN lorsqu’elle a été condamnée ou a reçu une absolution pour ce que l’on appelle une « infraction primaire ». Les infractions primaires sont des infractions graves prévues par le Code criminel, notamment plusieurs infractions sexuelles, le meurtre, l’homicide involontaire, les voies de fait graves, le vol qualifié, etc.

Dans le cas de ce que l’on appelle les « infractions secondaires », la cour a également le pouvoir discrétionnaire d’ordonner à un défendeur de fournir un échantillon d’ADN lorsqu’il a été condamné, acquitté ou fait l’objet d’un verdict de non‑responsabilité criminelle.

À quelques exceptions près, l’article 3 du projet de loi initial aurait modifié le Code criminel afin d’exiger, pour toute infraction primaire ou secondaire, une ordonnance de prélèvement génétique à la suite d’une condamnation, d’une absolution ou d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux.

Le comité a supprimé cet article du projet de loi. Le Code criminel est donc resté inchangé en ce qui concerne les situations où un tribunal peut ou doit émettre une ordonnance de prélèvement d’ADN.

Deuxièmement, l’article 4 du projet de loi, qui concernait le moment où les ordonnances discutées devaient être faites, a aussi été supprimé.

L’article 4 du projet de loi initial fixait les délais dans lesquels un tribunal aurait été tenu de rendre une ordonnance obligatoire de prélèvement d’ADN. Il était lié aux amendements proposés pour l’article 3, dont j’ai parlé.

Une majorité de membres du comité a décidé de supprimer cet article du projet de loi S-231.

Un troisième article, qui portait sur les recherches de liens de parenté, a aussi été rejeté.

L’article 18 du projet de loi aurait modifié la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques de manière à permettre la recherche de liens de parenté dans la banque nationale de données génétiques dans certaines circonstances. Il aurait ainsi été possible de chercher un profil d’identification génétique dans la banque nationale de données génétiques dans le but d’identifier un parent biologique de la personne dont l’ADN se trouve dans la banque de données.

Comme je l’ai dit, le comité a supprimé cet article du projet de loi.

Quatrièmement, l’article 20 traite des amendements relatifs à la destruction des empreintes génétiques contenues dans le fichier des condamnés de la banque de données si la personne est acquittée des accusations liées à l’ordonnance initiale de prélèvement d’empreintes génétiques et si l’accusé n’a pas fait l’objet d’une autre déclaration de culpabilité, d’une absolution ou d’une déclaration de non-responsabilité criminelle pour une infraction désignée qui aurait pu déclencher une ordonnance de prélèvement d’empreintes génétiques à l’origine. Le comité a amendé cet article pour supprimer les références aux déclarations de non‑responsabilité criminelle.

Cet amendement a pour conséquence qu’une personne qui a été acquittée d’une infraction désignée peut demander que ses empreintes génétiques soient supprimées de la banque de données malgré une décision distincte de non-responsabilité criminelle pour une autre infraction désignée.

Enfin, en ce qui a trait aux amendements majeurs, l’article 24 du projet de loi exige que le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Protection civile fassent rapport sur l’opportunité de prélever les empreintes génétiques au même titre que les empreintes digitales prélevées en vertu de la Loi sur l’identification des criminels. Le comité a amendé cet article pour exiger qu’un tel rapport soit établi et qu’il comprenne une analyse spécifique des effets inculpatoires et disculpatoires sur la responsabilité ou l’absence de responsabilité que le prélèvement génétique pourrait avoir dans le cas des populations autochtones, noires et racisées.

Je pense qu’il est juste de dire — et j’arrive à ma conclusion — que le comité a étudié avec sérieux le projet de loi, ce qui a souvent donné lieu à des discussions animées, et que les 17 témoins entendus ont été d’une aide précieuse. Au nom du comité, je tiens à remercier les témoins qui ont comparu devant nous.

Si on me le permet, je voudrais faire deux dernières observations, lesquelles sont un peu plus personnelles que le rapport du comité. Je pense qu’il est juste de dire que les membres du comité ne se sont pas opposés à l’utilisation des empreintes génétiques à des fins d’enquête. Cependant, la majorité des membres du comité se sont montrés préoccupés par le fait que les situations précises où le prélèvement et l’utilisation des empreintes génétiques seraient étendus menaient à des dispositions qui suscitaient un certain malaise chez eux. C’est pourquoi des dispositions du projet de loi ont été rejetées ou amendées.

Je m’attends à ce que mes collègues sénateurs, notamment les membres du comité et le parrain du projet de loi, le sénateur Carignan, développent mes observations sommaires pendant l’étude du rapport au Sénat. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur les compétences linguistiques

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Carignan, c.p., appuyée par l’honorable sénateur Housakos, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-220, Loi modifiant la Loi sur les compétences linguistiques (gouverneur général).

L’honorable Chantal Petitclerc : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est à son 15e jour et la sénatrice Ringuette souhaite participer au débat. Par conséquent, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 4-15(3) du Règlement, je propose l’ajournement du débat au nom de la sénatrice Ringuette.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

[Traduction]

Le Code criminel
La Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels

Déclaration d’intérêts personnels

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous informe que l’honorable sénatrice Anderson vient de faire une déclaration d’intérêts personnels concernant le projet de loi S-266 et que, conformément à l’article 15-7, cette déclaration sera consignée aux Journaux du Sénat.

Projet de loi sur le cadre national sur la maladie falciforme

Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Mégie, appuyée par l’honorable sénateur Cotter, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-280, Loi concernant un cadre national sur la maladie falciforme.

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je prends la parole à l’appui du projet de loi S-280, Loi concernant un cadre national sur la maladie falciforme, également appelée drépanocytose. Je remercie ma collègue la sénatrice Mégie de nous avoir donné un aperçu complet de cette maladie. Nous sommes privilégiés d’avoir pu compter sur son expertise médicale pour informer les Sénateurs des particularités de cette maladie héréditaire qui touche les gens dont les ancêtres venaient d’Afrique, des Caraïbes, du Moyen-Orient, de l’Amérique du Sud ou de certaines régions de l’Inde ou de la Méditerranée, ainsi que des défis médicaux complexes qu’elle présente.

(1650)

J’aimerais remercier ma collègue la sénatrice Cordy de militer pour cette cause depuis de nombreuses années, elle qui a notamment fait proclamer, en 2017, la Journée nationale de la sensibilisation à la drépanocytose. J’aimerais également souligner le travail de Tony Ince, député provincial de Cole Harbour—Portland Valley, qui a présenté et appuyé le projet de loi no 396, Loi instituant la Journée de sensibilisation à la maladie falciforme, en novembre 2023, dans ma province, la Nouvelle-Écosse. Le 19 juin sera désormais la Journée de sensibilisation à la drépanocytose en Nouvelle-Écosse.

J’appuie le projet de loi S-280 et je demande instamment qu’il soit renvoyé au comité pour y être étudié dès que possible. La maladie falciforme touche les personnes qui vivent à une intersection particulièrement vulnérable : celle de la race et du handicap. Vu l’incidence considérable des forces du racisme et du capacitisme sur le quotidien, je pense que le cadre contribuera sensiblement à améliorer de la vie des personnes noires atteintes de drépanocytose. Cette intersection résulte de problèmes systémiques et d’angles morts dans les orientations stratégiques, alors elle nécessite des solutions stratégiques telles que ce cadre.

Je conviens de l’importance de créer un centre national de recherche, d’améliorer la formation et les outils de diagnostic, d’établir des normes nationales basées sur des données probantes, d’assurer un dépistage néonatal sur une base équitable, de soutenir des campagnes publiques de sensibilisation et d’instaurer un crédit d’impôt pour les familles.

Des membres de ma parenté plus ou moins élargie ont été touchés par la drépanocytose. Pendant de nombreuses années, les Néo-Écossais d’origine africaine ont souffert en silence parce que cette maladie chronique était considérée comme un sujet tabou, un sujet dont on ne parlait nulle part ni à personne. Je suis reconnaissante à Josephine Etowa d’être un fer de lance depuis ses études de deuxième cycle en sciences infirmières — elle a eu le courage de se battre —, et à Rugi Jalloh, qui pilote les forces bénévoles en Nouvelle-Écosse et dans l’ensemble du Canada sur cette question. Leurs efforts ont permis de conscientiser l’opinion publique, de réduire la stigmatisation et de faire évoluer les politiques. Aujourd’hui, chers collègues, il est temps d’élargir la portée de ce travail à l’échelle nationale, et le projet de loi S-280 nous permet de le faire.

En 2013, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a annoncé la mise en place du programme de dépistage des nouveau-nés dans les Maritimes. Josephine Etowa était alors, comme je l’ai dit plus tôt, une étudiante diplômée en sciences infirmières et elle a joué un rôle déterminant dans l’introduction du dépistage de la drépanocytose chez les nouveau-nés en Nouvelle-Écosse. Procéder à un dépistage le plus tôt possible permet en effet de sauver des vies. Les bébés peuvent ainsi obtenir des traitements vitaux à un stade précoce, de façon à prévenir des dommages irréversibles, à réduire le nombre d’hospitalisations futures et à empêcher l’apparition de symptômes graves.

Mme Etowa étudie le racisme dans les systèmes de santé. Grâce à ses recherches, elle a détecté une absence de dépistage pour la maladie falciforme. Ce programme de dépistage précoce est un excellent exemple concret d’équité raciale dans le système de santé : un test qui, dans les systèmes médicaux traditionnels, ne semble peut-être pas améliorer considérablement la qualité de vie de la plupart des enfants, mais qui peut améliorer considérablement celle de familles noires et d’autres familles racisées en permettant l’obtention d’un diagnostic précoce. Il s’agit essentiellement, chers collègues, d’un exemple d’adaptation à la culture dans les systèmes de santé.

J’ai consulté l’organisation ASE Fondation communautaire pour les Canadiens noirs handicapés, qui a affirmé appuyer le projet de loi S-280 en principe en raison de sa capacité à améliorer la vie des personnes noires atteintes de cette maladie chronique. Elle recommande que le projet de loi reconnaisse explicitement l’intersectionnalité de la race et du handicap et l’incidence du racisme anti-Noirs sur la santé et l’accès à du soutien et à des soins. Elle suggère également que le projet de loi recommande explicitement que le cadre englobe une formation adaptée à la culture pour les professionnels de la santé.

Elle dit ceci :

Le projet de loi S-280 représente une étape cruciale dans la reconnaissance et la prise en compte des défis uniques auxquels se heurtent les Canadiens noirs atteints de la maladie falciforme.

Lorsque ce projet de loi sera renvoyé au comité, je vous encourage à inviter Mme Etowa et les responsables de l’ASE Fondation communautaire à venir témoigner. Cela vous éclairera sur le dossier.

L’association de l’anémie falciforme du Canada atlantique a récemment envoyé un bulletin d’information où sa fondatrice et présidente, Rugi Jalloh, raconte un échange qu’elle avait eu avec une personne atteinte de la maladie falciforme, à qui elle avait demandé comment elle allait. Cette personne avait répondu : « Respirer me fait mal, c’est vrai, mais c’est un bonheur d’être en vie. »

Mme Jalloh a dit qu’en raison de ses nombreux séjours à l’hôpital, cette personne n’avait pas pu fréquenter l’université pendant tout le trimestre, même en tenant compte des mesures d’adaptation pédagogiques habituelles qui lui étaient offertes. Je raconte l’histoire de cette personne pour montrer à quel point la maladie falciforme peut empêcher les gens de faire des études et de trouver ensuite un emploi intéressant.

Chers collègues, la maladie falciforme touche tous les aspects de la vie des personnes qui en sont atteintes, alors un cadre qui porte sur cette maladie a le potentiel de changer le quotidien des Canadiens noirs qui vivent avec l’anémie falciforme.

Je pense que leur vie en vaut la peine. Je vous exhorte à réaliser la nécessité d’appuyer le projet de loi S-280 et j’ai hâte que les membres du comité étudient les tenants et les aboutissants du cadre proposé.

Asante. Merci.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

La Loi sur les parcs nationaux du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Boehm, appuyée par l’honorable sénatrice Galvez, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-248, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada (parc urbain national Ojibway du Canada).

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la protection financière pour les producteurs de fruits et légumes frais

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur MacDonald, appuyée par l’honorable sénateur Boisvenu, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (fiducie réputée — fruits et légumes périssables).

L’honorable Brent Cotter : Honorables sénateurs, je prends la parole à titre de porte-parole pour le projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (fiducie réputée — fruits et légumes périssables).

Je me rends compte que je dispose de 45 minutes aujourd’hui. Je tiens à vous dire que mon discours compte 21 pages. Si vous le souhaitez, je peux dire le numéro des pages au fur et à mesure.

Je voudrais commencer à la page 0. Lorsque je suis arrivé au Sénat, j’avoue que j’ai été surpris de constater que j’avais rencontré, presque par accident et tout au long de ma carrière, bon nombre des problèmes auxquels nous nous attaquons ici, et j’avais l’habitude de m’asseoir dans ce coin-là, soit dans les sièges les plus éloignés. J’étais là avec l’ancienne sénatrice Judith Keating. Nous comparions nos notes sur — fait remarquable — ce que nous savions et peut-être aussi sur ce que nous ne savions même pas que nous savions.

(1700)

Une des choses que j’ai apprise de l’ancienne sénatrice Keating pendant nos conversations, c’est pourquoi elle avait demandé au sénateur Percy Mockler d’être son parrain. Je regrette qu’il ne soit pas ici en ce moment. Les nouveaux sénateurs savent peut-être que l’ancienne sénatrice Keating est malheureusement décédée après avoir servi seulement quelques années au Sénat. J’ai eu l’audace de lui demander pourquoi elle avait demandé au sénateur Percy Mockler d’être son parrain. Elle m’a répondu que c’est parce que, même si elle n’était pas toujours d’accord au sujet des opinions du sénateur Mockler, elle voulait être une sénatrice du même acabit.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Cotter : Je suis ici depuis quatre ans et je veux moi aussi — autant que possible, en tant que sénateur et dans la vie — être comme le sénateur Mockler. C’est le plus court hommage que recevra le sénateur Mockler cette semaine.

Pour en revenir au projet de loi, si vous me le permettez, comme vous le constaterez d’après mes observations, je suis un porte‑parole bienveillant de ce projet de loi et je l’appuie. Je vous exhorte, chers collègues, à faire de même.

Le cheminement législatif de ce projet de loi a commencé le 22 novembre 2021 à l’autre endroit. J’espère que nous sommes près de la ligne d’arrivée. Mes observations se divisent en quatre parties.

Premièrement, j’aimerais prendre quelques minutes pour parler du projet de loi lui-même, de ses objectifs généraux et des raisons pour lesquelles il est nécessaire.

Deuxièmement, je parlerai assez longuement — ce sera la partie la plus intéressante de mon intervention — du fonctionnement du projet de loi et de la façon dont il s’insère dans une structure de politique publique généralement compliquée et, à certains égards, inadéquate en ce qui concerne les créanciers en cas de faillite, d’insolvabilité et de restructuration.

C’est un domaine complexe du droit dans lequel nous nous aventurons. J’aimerais faire part au Sénat de quelques réflexions qui, je l’espère, en expliqueront les nuances et les motifs pour lesquels on a recours de manière légitime à une technique quelque peu inhabituelle et artificielle pour protéger les intérêts des producteurs de fruits et légumes périssables.

Dans ce contexte, je soulignerai quatre lacunes ou, du moins, des limites pratiquement inévitables à l’efficacité du projet de loi et à ses espoirs de protéger les producteurs de fruits et légumes périssables dans les situations où leurs acheteurs ont fait faillite ou sont devenus insolvables.

Troisièmement, je dirai quelques mots sur la question des créanciers non garantis, plus généralement, dont les producteurs de fruits et légumes constituent un sous-ensemble important.

Au cours de mon exposé, j’espère cerner pour vous un ensemble cohérent de vulnérabilités vécues par les créanciers non garantis, des vulnérabilités qui sont omniprésentes et qui appellent à une étude plus complète et organisée des lacunes de la politique publique qui sont inhérentes à la structure actuelle de la faillite et de l’insolvabilité en ce qui concerne la façon dont les créanciers non garantis sont placés et peu indemnisés.

Quatrièmement, je dirai quelques mots au sujet du projet de loi dans le contexte du commerce international et de la manière dont il pourrait s’avérer constructif si le Canada s’en sert comme un rameau d’olivier tendu vers les États-Unis, car il pourrait engendrer des avantages et des retombées économiques pour les producteurs de fruits et légumes canadiens et américains.

Pour commencer, comme l’a souligné le parrain du projet de loi à la Chambre des communes, et comme le sénateur MacDonald — son parrain au Sénat — l’a indiqué dans son discours à l’étape de la deuxième lecture, des événements particuliers liés à l’insolvabilité des épiciers ont eu des conséquences négatives importantes pour les producteurs de fruits et légumes périssables.

Ces conséquences sont dues au fait que lorsque quelqu’un vend des fruits et légumes à un grossiste ou à un détaillant, mais n’a pas encore été payé, et que le grossiste ou le détaillant devient insolvable et incapable de payer ses factures, le vendeur de fruits et légumes occupe une place inférieure dans la hiérarchie de l’indemnisation. Dans le langage de la législation sur la faillite et l’insolvabilité, il s’agit d’un créancier non garanti.

« Non garanti » signifie qu’ils n’ont aucune sorte de propriété ou de garantie sur ce qu’ils ont vendu ou sur les actifs de la personne qui a acheté le produit. Il s’avère que les créanciers non garantis se trouvent au bas de l’échelle lors de la répartition des biens insolvables.

Deuxièmement, je parlerai du fonctionnement du projet de loi. Comme je l’ai dit, ce sera la partie la plus longue et la plus fascinante de mon intervention. Pour replacer le projet de loi dans son contexte, il est nécessaire de parler de la situation des créanciers en général et de la manière dont elle se manifeste dans les faillites et les cas d’insolvabilité.

Dans une autre vie, je faisais pareilles présentations dans un autre cadre. J’utilisais des accessoires. Oh, si seulement je pouvais avoir un accessoire aujourd’hui.

Lorsqu’une entreprise démarre ses activités ou prend de l’expansion, elle a presque toujours besoin de capital. Même si les sources de capital varient, le moyen le plus courant est d’emprunter auprès d’institutions financières.

Les institutions financières de ce pays font tous les jours des investissements importants sous forme de prêts aux entreprises commerciales. Elles mettent beaucoup d’argent en jeu, et elles ne sont pas stupides. Elles savent mieux que quiconque qu’un nombre considérable d’entreprises dans une foule de secteurs sont susceptibles d’essuyer des échecs. C’est pour cette raison qu’elles prennent des mesures judicieuses pour protéger leurs investissements le mieux possible.

J’ai choisi délibérément le mot « protéger » pour souligner un point en particulier. De façon générale, les institutions financières protègent leurs investissements au moyen d’une foule de mesures qu’on appelle couramment des « sûretés » dans le domaine juridique. Il peut s’agir d’une hypothèque, d’une charge d’entretien, d’une cession de créances ou, dans le cas des banques, de valeurs mobilières au sens de la Loi sur les banques.

Presque toutes les sûretés ont pour effet de donner aux institutions financières l’équivalent d’un droit de propriété qui peut s’exercer à l’égard d’une grande partie — souvent même de la plupart — des actifs de l’entreprise à laquelle elles prêtent de l’argent. Il s’agit d’une proposition commerciale tout à fait raisonnable, comme le sénateur Loffreda nous l’a rappelé. En effet, la vitalité de notre économie et de notre société dépend en grande partie de l’accès au crédit qui est offert par ces institutions financières. Elles ont également à leur disposition des moyens très efficaces comme les sûretés pour protéger leurs investissements.

S’il y a faillite ou insolvabilité, l’attrait particulier de ces garanties devient évident. En cas de faillite ou d’insolvabilité, un tiers neutre, un syndic ou un séquestre est chargé de rassembler tous les actifs du débiteur insolvable et de répartir les produits entre les créanciers selon une structure de distribution particulière. Par exemple, la structure établie dans la Loi sur la faillite et l’insolvabilité.

La protection de l’institution financière prend essentiellement la forme d’un droit de participation aux actifs du débiteur insolvable à la hauteur de la dette contractée auprès de l’institution financière.

Par conséquent, d’un point de vue juridique, dans la mesure de la créance du prêteur, les actifs du débiteur insolvable appartiennent essentiellement à l’institution financière. En droit, donc, dans la mesure de cette créance, ces actifs ne font pas partie des biens de l’entreprise insolvable à partager entre les autres créanciers.

En effet, les créanciers garantis procèdent souvent au recouvrement de leurs investissements sans passer par une procédure de faillite ou d’insolvabilité, puisque les termes de leurs accords de prêt les y autorisent pratiquement toujours, en saisissant et en vendant les actifs du débiteur lorsque ce dernier n’effectue pas les paiements prévus par le prêt.

Vous connaissez peut-être le film La Mort en prime ou une personne dont la voiture a été saisie parce qu’elle n’avait pas effectué ses paiements. Eh bien, imaginez La Mort en prime à grande échelle.

Dans bon nombre de ces cas, les institutions financières perdent elles-mêmes de l’argent. Cela rend une autre option attrayante, en particulier dans le cas de débiteurs insolvables relativement importants.

C’est l’occasion, si les créanciers sont suffisamment d’accord, pour l’entreprise de se restructurer et de conclure ce que l’on appelle des « arrangements » en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. L’objectif est de donner à l’entreprise la possibilité de se revitaliser dans l’intérêt de tous, y compris des créanciers. C’est ce que permet la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Je reviendrai sur un aspect de cette loi dans quelques minutes.

Pour en revenir à la faillite ou à l’insolvabilité classique, une fois que les créanciers garantis ont fait valoir leurs droits, souvent, il ne reste pas grand-chose pour les créanciers non garantis. Parfois, il ne reste rien du tout. Parmi les créanciers non garantis restants figurent, dans bien des cas, des producteurs de fruits et légumes périssables qui ont vendu leurs produits à une entreprise devenue insolvable, et qui n’ont pas été payés.

(1710)

À ce stade, vous vous dites peut-être que c’est dommage, qu’ils auraient dû mieux évaluer le risque lorsqu’ils ont commencé à vendre leurs produits à l’entreprise qui a finalement fait faillite. Ou bien, vous pourriez dire qu’ils auraient dû prendre de meilleures garanties pour protéger leur créance, comme le font les banques. Paradoxalement, s’ils se trouvent dans cette situation, c’est en partie parce qu’ils n’ont pas accès, à propos de leur acheteur, au genre de renseignements financiers que les prêteurs peuvent exiger. En outre, ils n’ont pas le pouvoir de négociation nécessaire pour obtenir des sûretés de la part de leurs clients, comme le font les institutions financières lorsqu’elles prêtent de l’argent à la même entreprise.

Le même dilemme s’applique aux travailleurs qui, jusqu’à ce qu’ils soient payés à la fin de la période de paie, sont eux aussi des créanciers non garantis, comme les producteurs de fruits et légumes. Voici un petit exemple à propos de l’accès à l’information financière et du manque d’influence, vus sous l’angle d’une employée.

En début de semaine, la petite-fille de 16 ans de ma conjointe s’est vu proposer un emploi dans un magasin de vêtements. Elle n’a aucune idée de la viabilité financière du magasin. Je lui ai suggéré qu’avant d’accepter l’emploi et afin de s’assurer qu’elle sera payée à la fin de chaque mois, elle demande les informations financières du magasin : ses revenus, ses dépenses, sa masse salariale, son endettement, ses pertes et profits et — je n’ai pas fini — une hypothèque sur tous les actifs du magasin de vêtements afin de garantir son salaire à temps partiel. Pouvez-vous imaginer comment se déroulerait une telle conversation? Je ne sais pas exactement comment elle se déroulerait, mais la dernière phrase de la conversation serait probablement : « Je pense que nous allons embaucher quelqu’un d’autre. » À 16 ans, même elle trouvait cette proposition absurde et risible. La situation n’est pas aussi dramatique pour les producteurs de fruits et légumes, mais le manque de marge de manœuvre prévaut également dans leur secteur.

Pour en revenir au secteur des fruits et légumes, il ne fait aucun doute que les fonds injectés par les institutions financières sont un élément indispensable à la création et au développement des entreprises. Il ne faut toutefois pas oublier que, dans ce secteur et dans le secteur alimentaire en général, les fournisseurs du produit de base qui sera vendu par une épicerie ou un fabricant précis ne sont pas moins essentiels à la réussite de l’entreprise. Je suis sûr que vous conviendrez de ce qui suit : la beauté de l’épicerie ou de l’usine de transformation des fruits et légumes importe peu. S’il n’y a aucun fruit ou légume, l’entreprise ne va nulle part. Lorsque l’épicerie ou un autre acheteur devient insolvable, il n’est pas immédiatement évident que la répartition la plus équitable du produit des ventes entre les créanciers devrait privilégier les institutions financières. En effet, ce privilège repose sur le pouvoir du marché dont disposent ces institutions lorsqu’elles prêtent de l’argent.

Il y a un autre facteur qui mérite d’être pris en considération lorsque nous examinons le tableau de l’insolvabilité. Je ne m’y risquerais pas, mais j’ai essayé avec la sénatrice Robinson et elle a semblé l’apprécier.

Quand les institutions financières subissent une perte sur de tels investissements, elles disposent de stratégies pour gérer les risques et les répartir sur l’ensemble de leur portefeuille de prêts. En outre, elles peuvent ajuster de façon mineure les taux d’intérêt auxquels elles prêtent de l’argent pour se prémunir contre ce risque. Toutefois, il est rare, du moins à ma connaissance, qu’une institution financière devienne insolvable simplement parce qu’un débiteur fait faillite. En comparaison, la plupart des producteurs de fruits et légumes n’ont pas une telle taille, et ils ne disposent ni d’une telle expertise ni d’une telle ingéniosité. Dans les cas où des quantités importantes de fruits et de légumes ont été fournies à crédit et que les fournisseurs ne sont pas payés, le risque d’insolvabilité devient beaucoup plus grand pour eux. Il s’agit d’une tragédie financière qui a des conséquences pour leurs propres créanciers, leurs travailleurs, et cetera.

Quand un arbre tombe dans la forêt et qu’il n’y a personne pour l’entendre, fait-il du bruit? Je n’en sais rien. Toutefois, quand un arbre tombe dans la forêt et qu’il renverse un autre arbre, et que cet arbre en renverse un autre, et ainsi de suite, que quelqu’un l’entende ou non, beaucoup d’arbres tomberont. Tenter de réduire le risque de chute du premier arbre afin que toute une rangée d’arbres n’en subisse pas les conséquences me semble être une bonne politique publique. Il devient facile de comprendre pourquoi une intervention publique est appropriée pour tenter de rééquilibrer la situation.

En ce qui concerne cette intervention, le projet de loi C-280 a été adopté à l’autre endroit à 320 voix contre une.

Maintenant que nous avons vu comment les institutions financières cherchent, en toute légitimité, à protéger leurs intérêts lorsqu’elles prêtent de l’argent à une entreprise commerciale, on comprend que le projet de loi C-280 vise une version légèrement modifiée de la même stratégie afin de protéger les producteurs de fruits et légumes qu’on ne paie pas.

Voici comment cela fonctionne. J’ai besoin d’un autre accessoire à ce stade-ci.

Ce projet de loi crée ce que l’on appelle une fiducie réputée en faveur des producteurs de fruits et légumes. Pour comprendre un peu mieux cette fiducie et ses limites, il faut bien comprendre le concept de fiducie.

Permettez-moi de vous donner un exemple qui n’a aucun lien. Des membres de la famille ou des amis de certains sénateurs leur ont déjà demandé d’être leur exécuteur testamentaire. Dans un tel cas, l’exécuteur prend possession des biens du défunt et il en obtient ce qui est souvent appelé la propriété légale. Il est possible qu’il doive vendre une partie des biens de la succession du défunt. À cette fin, l’exécuteur doit disposer de la propriété en common law, mais aux yeux de la loi, il détient la propriété en fiducie pour les bénéficiaires du testament. Cela signifie que ceux-ci — et non l’exécuteur — sont reconnus comme les propriétaires bénéficiaires de la propriété.

De plus, en droit des fiducies, on s’attend à ce que les fiduciaires ne mélangent pas leurs biens personnels — comme leurs comptes bancaires — avec les biens qui leur sont confiés à titre d’exécuteur, comme d’autres comptes bancaires, par exemple. La mise en commun de biens est interdite. En effet, en droit des fiducies, la mise en commun met en danger l’existence de la fiducie, en partie parce qu’il devient impossible de déterminer ce qui fait partie ou non de la fiducie. En langage juridique, il devient impossible de retracer le bien fiduciaire.

Ce projet de loi vise à créer une fiction juridique au nom des producteurs de fruits et de légumes périssables, qui sont essentiellement des créanciers dans cette situation. Le projet de loi établit une fiducie réputée afin que le fournisseur de fruits et de légumes acquière, à un moment donné, un intérêt bénéficiaire dans les fruits et les légumes ou les produits de leur vente, même si la propriété légale a peut-être été transférée à l’acheteur insolvable. L’effet juridique de cette fiducie est d’empêcher que l’acheteur de ces fruits et légumes, celui qui n’a pas payé — c’est-à-dire l’acheteur insolvable — ne touche tous les intérêts légaux et juridiquement exécutoires pour ces fruits et ces légumes. Ce projet de loi retire à l’acquéreur la propriété effective du produit ou de l’argent issu de ce produit.

Comme vous pouvez le constater, il s’agit d’un projet de loi complexe, mais les mesures législatives peuvent faire beaucoup de choses pour créer une bonne politique publique.

Il s’agit essentiellement d’empêcher que le bien, à savoir les fruits ou les légumes et le produit de leur vente, ne devienne la propriété véritable de l’acheteur tant que le vendeur de fruits et légumes n’a pas été payé, empêchant ainsi que le bien soit considéré comme faisant partie de la garantie de l’institution financière. Cela permet aux producteurs de fruits et légumes qui ont fourni le produit d’être les premiers ayants droit à ces biens en cas de faillite, d’insolvabilité ou de restructuration, car, en vertu de ce projet de loi, le produit ou le produit des ventes est leur propriété, et non celle du débiteur qui a acheté le bien.

Dans une certaine mesure, vous pouvez comprendre pourquoi il faut procéder de cette manière. Une fois que l’acheteur bientôt insolvable a acquis la pleine propriété du bien, la garantie du prêteur s’y rattache et toute priorité pour les fruits et légumes est perdue. La structure ordinaire des dispositions de ce projet de loi aboutit à ce résultat. Toutefois, pour que cela soit parfaitement clair, le paragraphe 2(2) de la modification à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et le paragraphe 3(2) de la modification à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies énoncent — et vous comprenez ce que je veux dire ici :

Il est entendu que les fruits ou légumes périssables, ainsi que tout produit de vente, ne sont pas compris dans les biens de l’acheteur dès lors qu’ils sont réputés être détenus en fiducie par l’acheteur pour le fournisseur au titre du paragraphe (1).

Je me permets d’insister : ils « [...] ne sont pas compris dans les biens de l’acheteur [...] ».

(1720)

En revanche, aussi efficace que puisse être cette fiducie, il y a quatre éléments du projet de loi qui, franchement, limitent son efficacité. Je crois qu’il importe de vous faire part de ces quatre éléments.

Premièrement, à cause de la structure du projet de loi, la fiducie même et les actifs ne sont constitués qu’après une série d’étapes procédurales. Le fournisseur de fruits ou légumes doit notifier, conformément à l’article pertinent de la loi, son intention d’invoquer la disposition relative à la fiducie, et il est nécessaire qu’un certain délai — jusqu’à 30 jours — s’écoule pendant lequel l’acheteur ne paie pas la totalité du solde dû pour les fruits ou les légumes.

Voici le problème : pendant cette courte période, la fiducie n’a pas encore été constituée sur le bien, et il est presque certain que la sûreté prise par un prêteur financier sera constituée sur les fruits ou les légumes et le produit de leur vente pendant cet intervalle et que le prêteur devancera le fournisseur pour constituer un droit de propriété sur les fruits ou les légumes avant que la fiducie n’ait la possibilité d’intervenir.

J’ai passé des années à mener des études et à écrire au sujet des moyens qu’on pourrait prendre pour essayer de faire en sorte que les fiducies « réputées » et autres véhicules aillent au-delà des intérêts commerciaux des institutions financières pour protéger les salaires impayés en cas de faillite, et il est juste de dire que c’est presque impossible à faire sans prévoir des mesures très strictes et hautement interventionnistes — voire plutôt irréalistes — dans les lois.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Les provinces ont été les plus actives lorsqu’il s’agit de protéger les salaires des employés en cas d’insolvabilité. Elles ont essayé de recourir aux hypothèques et aux fiducies réputées et de faire passer cela avant tout dans ce genre de situation. Prenons l’exemple des fiducies d’origine législative à l’égard des salaires. Voici une situation qui se produit souvent. Prenons l’exemple d’une personne qui commence à travailler aujourd’hui et qui doit recevoir son salaire à la fin du mois. Cette personne est un créancier de son employeur jusqu’à ce qu’on lui paie son salaire.

D’ailleurs, nous sommes nous-mêmes des créanciers du gouvernement du Canada. Certains d’entre nous ont travaillé fort et n’ont pas encore reçu leur salaire pour neuf jours de travail. Cependant, notre employeur est probablement dans une situation suffisamment stable pour que nous puissions être payés à la fin du mois d’avril.

Une fiducie d’origine législative comme dans la situation que je viens de décrire, créée, disons, par une province, grève immédiatement les actifs de l’employeur pour garantir votre salaire. C’est merveilleux. Dans bien des provinces, elle a préséance sur tout autre créancier, y compris les créanciers garantis. Toutefois, lorsque vous êtes payé, vous n’êtes plus créancier, même pour un jour. La fiducie prend fin, pour être réactivée le lundi lorsque vous commencez à travailler pour le mois suivant. Cependant, durant la fin de semaine, votre fiducie d’origine législative n’est plus — en langage juridique, elle a été annulée par règlement —, et automatiquement, la sécularité des créanciers garantis entre en jeu.

Le lundi, lorsque votre fiducie se réactive afin de grever les biens de l’employeur, elle s’applique aux biens que l’employeur possède, c’est-à-dire à ces biens moins la valeur de la sûreté du prêteur, car, au cours de la fin de semaine, cette sûreté s’est appliquée aux biens pendant que vous aviez détourné votre regard.

Les tribunaux font preuve de diligence pour protéger ces règles conventionnelles de priorité concernant les sûretés commerciales lorsque les lois conventionnelles et les faits sur le terrain le permettent. Ce n’est pas mauvais; c’est simplement une concurrence entre les demandeurs et, bien franchement, les « petites gens » ont peu d’influence et ont tendance à être perdants. Ainsi, le délai d’entrée en vigueur de la fiducie aux termes de ce projet de loi risque en fait d’en ruiner l’efficacité.

Deuxièmement, étant donné qu’il est courant que les biens fournis dans ces situations soient mélangés à d’autres biens, et certainement que les produits soient regroupés dans des comptes bancaires ou dans des caisses enregistreuses, entre autres, la mise en commun est inévitable. Comme je l’ai mentionné plus tôt, en droit des fiducies, la mise en commun des biens d’une fiducie et d’autres biens peut être fatale à une fiducie. La situation est d’autant plus compliquée que ces règles relèvent de la compétence provinciale et que la mesure législative précise qu’elle ne contredit pas les principes fondamentaux des fiducies sous réglementation provinciale.

Troisièmement, le projet de loi s’applique à une partie très précise de la loi, et cela devrait indiquer à la présidente du Comité des banques certaines préoccupations concernant la structure de la distribution des actifs ou leur valeur en cas de faillite et d’insolvabilité.

Dans cette partie précise de la loi relative à la restructuration de grandes entreprises dans le cadre de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, un autre obstacle se présente. Lorsque ces initiatives de restructuration d’une entreprise sont mises en œuvre pour sauver une entreprise en difficulté à l’aide d’une restructuration financière, des personnes talentueuses doivent être engagées pour effectuer le gros du travail et tenter de remettre l’entreprise sur pied : des gens d’affaires, des comptables, et des financiers avisés, entre autres. Il faut les rémunérer, ce qui semble équitable. La Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies permet aux tribunaux de protéger les ententes de paiement de ces personnes. Sinon, bon nombre d’entre elles n’accepteraient même pas, dans certains cas, d’effectuer le travail, ce qui est tout à fait compréhensible.

En vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, les tribunaux peuvent ordonner que ces personnes soient payées avant les créanciers garantis et la fiducie la plus prioritaire de toutes dans la législation fédérale, la fiducie d’origine législative de la Loi de l’impôt sur le revenu pour le versement des déductions d’impôt sur le revenu du salaire des employés que l’employeur insolvable était censé conserver et verser, mais qu’il n’a pas fait. La Loi de l’impôt sur le revenu confère à cette créance sur le gouvernement du Canada une véritable super-priorité.

En 2021, dans une affaire intitulée Canada c. Canada North Group Inc., la Cour suprême du Canada a statué à cinq contre quatre qu’un juge pouvait ordonner une sûreté sur les actifs d’une entreprise pour payer l’équipe de restructuration, et qu’une telle ordonnance était une super-priorité qui avait préséance sur tout, y compris la super-priorité de la fiducie d’origine législative de l’impôt sur le revenu, soit une fiducie plus importante et plus puissante que celle envisagée dans ce projet de loi. Il semble probable que la fiducie réputée pour les producteurs de fruits et légumes périssables créée par le projet de loi C-280 devra céder la place à des demandes d’indemnisation semblables lors d’une restructuration de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.

Quatrièmement, il y a une limitation d’ordre plus général. Il existe de nombreuses statistiques officielles concernant les procédures de faillite et les mises sous séquestre officielles. Pour vous donner une idée de la situation, pendant et après la COVID, le nombre de faillites et de mises sous séquestre officielles a diminué. Vous vous demandez peut-être comment cela est possible. Le gouvernement du Canada, grâce à la contribution de l’ensemble des Canadiens, a soutenu un grand nombre de ces entreprises, mais cette période a été marquée par de réelles difficultés économiques.

Vous aurez compris la situation : les statistiques officielles masquent l’impact réel que subissent les entreprises qui épongent le non-paiement des entreprises insolvables. En effet, un grand nombre de petites entreprises mettent tout simplement la clé sous la porte, incapables de payer leurs factures. Dans ces circonstances, les créanciers non garantis ne reçoivent pratiquement rien sur leurs créances.

Comme beaucoup d’entre vous le savent, si une personne n’est pas en mesure de payer ses dettes, la seule solution pour se remettre à flot est de passer par une procédure formelle, soit par la faillite, soit par les procédures autorisées par la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. Il vous faut vraiment une solution pour vous remettre sur pied.

J’ai donné un cours sur la faillite et l’insolvabilité pendant un certain temps, et j’avais l’habitude de parler de ce processus comme d’une « douche financière », où vos dettes sont effacées, mais où vous perdez tout, sauf le plus élémentaire — vos « sous-vêtements financiers ». Tout le reste est remis aux créanciers. Sans cette « douche financière », vous êtes essentiellement dans un cul-de-sac.

(1730)

Il en va différemment pour les entreprises constituées en société. Tout d’abord, elles ne sont pas des personnes physiques. Si elles rencontrent de graves difficultés financières, les créanciers garantis reprennent possession des actifs, et les créanciers non garantis peuvent les poursuivre ou les mettre en faillite, mais cela n’en vaut souvent pas la peine, et les créanciers non garantis se contentent d’encaisser leurs pertes. L’entreprise insolvable peut essentiellement feindre l’absence de moyens financiers et se débarrasser de ses dettes. C’est la partie de l’insolvabilité qui se trouve en dessous des chiffres officiels, mais qui constitue la pointe de l’iceberg, si l’on peut dire.

Ce sont presque toujours les entreprises acheteuses, grandes et petites, qui se mêlent de l’achat et de la vente de produits. La fiducie fonctionne, mais, pour qu’elle fonctionne, le créancier peut avoir à déposer une réclamation contre l’un de ces débiteurs, reconnaissant que s’il y a des créanciers garantis, ils se seront engouffrés dans la brèche et auront réclamé les actifs du débiteur, c’est-à-dire l’acheteur des fruits ou des légumes. Cette démarche n’est pas aussi simple que celle consistant à faire valoir une créance dans le cadre d’une faillite, car elle implique un certain risque financier pour l’intéressé. À la lumière de ce que j’ai suggéré au sujet de certaines des subtilités entourant la qualité de cette fiducie réputée, les gens peuvent être réticents à le faire.

J’en arrive maintenant à ma troisième série d’observations — beaucoup plus brèves, je suis sûr que vous serez soulagés de l’apprendre. Je voudrais dire un mot ou deux sur les créanciers non garantis en général. Comme je l’ai dit plus tôt, ces gens se retrouvent au bas de la liste lorsqu’il s’agit de recouvrer des factures impayées en cas de faillite et d’insolvabilité. Ce que je veux dire ici — et ce projet de loi aborde cet enjeu en partie —, c’est qu’il y a de sérieuses questions à se poser quant à savoir si, du point de vue de la politique publique, nous avons les bonnes priorités en matière d’indemnisation dans les cas de faillite et d’insolvabilité.

Chacun des demandeurs dans ces circonstances a une demande légitime. Toutefois, les priorités en ce qui concerne ces demandes ont tendance à être déterminées, d’une part, par l’emprise sur le marché et, d’autre part, par les priorités structurées par le gouvernement. Je vais donner un exemple incongru.

Le recouvrement des déductions d’impôt à la source des employés auprès d’un employeur insolvable me semble tout à fait légitime. Les gens doivent payer leurs impôts, sinon, comment les sénateurs seront-ils payés? On accorde aux déductions d’impôt sur le revenu de ces employés une priorité législative absolue dans le régime de recouvrement. Eh bien, j’aurais pensé que le salaire non payé des employés, la part qu’ils ont réellement gagnée, mériterait au moins la même protection. À ma connaissance, le gouvernement du Canada n’a pas fait faillite parce qu’il n’a pas recouvré certaines de ces déductions d’impôt à la source, mais les employés, en particulier ceux qui occupent des postes peu rémunérés, sont extrêmement vulnérables lorsqu’ils ne sont pas payés. C’est une injustice, à mon avis.

Deuxièmement, pour tenter de résoudre cette question, le gouvernement du Canada a instauré une modeste indemnisation des employés non rémunérés dans le cadre du Programme de protection des salariés. Cela fait en sorte que les employés reçoivent une partie de ce qui leur est dû, mais seulement une partie — et ils ne voient que rarement le reste. Est-il vraiment logique à cet égard que les contribuables subventionnent les réclamations des grands créanciers qui pourraient facilement restructurer leurs priorités et, en échange, ne devrait-on pas donner aux travailleurs un statut de créancier prioritaire ou protéger les producteurs de fruits et légumes périssables de la même façon? Il y a de nombreuses autres anomalies et, bien sûr, conséquences qui découleraient de ces modifications si nous devions les apporter. Ce qu’il faut retenir, c’est que l’ensemble du régime doit être étudié et réexaminé attentivement.

Il faut reconnaître que le Parlement a mené une étude de ce genre il y a une dizaine d’années. Qu’est-ce que cela a donné? Un rapport parlementaire, un point c’est tout. Des éléphants ont travaillé vraiment très fort et n’ont même pas accouché d’une souris. Il faut réexaminer tout cela. Cela constituerait pour nous — pour le Comité des banques peut-être — un projet honorable et idéal, et je profite de l’occasion pour exhorter mes collègues à l’entreprendre.

Enfin, ce projet de loi a une importante dimension de politique commerciale. Le sénateur MacDonald en a parlé lui aussi. L’absence du type de protection que ce projet de loi offrirait aux producteurs de fruits et légumes périssables les a privés de l’accès à ce genre de protection lorsqu’ils vendent des fruits et des légumes périssables à des acheteurs américains. Les États-Unis ont une forme de protection comparable pour ces vendeurs aux États-Unis, protection qui a déjà été accessible aux vendeurs canadiens. Cette loi est la Perishable Agricultural Commodities Act. L’absence, au Canada, du même genre de protection pour les vendeurs américains de fruits et de légumes a entraîné le refus d’offrir une protection semblable aux Canadiens qui vendent des fruits et des légumes périssables aux États-Unis.

Outre le fait qu’il constitue une politique commerciale coopérative et constructive, ce projet de loi pourrait aussi contribuer à élargir les marchés de nos vendeurs de fruits et de légumes périssables. Il réduit les risques lorsqu’ils vendent leurs produits sur le marché américain et il encouragera sans aucun doute nos producteurs à explorer de nouveaux débouchés. À cet égard, il s’agit d’une mesure avantageuse pour tout le monde.

En conclusion, bien que je ne sois pas convaincu que le projet de loi puisse produire tous les résultats espérés, comme je l’ai dit, il s’agit d’un bon pas en avant fortement soutenu par l’autre endroit. Je dirais aussi qu’il s’agit d’une bonne politique publique intérimaire. Je vous encourage vivement à appuyer ce projet de loi et à voir à ce qu’il soit adopté rapidement au Sénat. Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Sénatrice Simons, avez-vous une question?

L’honorable Paula Simons : En effet. Sénateur Cotter, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Cotter : Oui.

La sénatrice Simons : Je ne peux en aucun cas égaler votre expertise en matière de compréhension du droit de la faillite — je doute qu’il y ait un sénateur dans cette enceinte qui puisse le faire —, mais je suis préoccupée parce que la surintendante des faillites a écrit aux membres du Comité de l’agriculture et du Comité des banques. Elle a soulevé des préoccupations sérieuses et importantes au sujet de ce qu’elle a qualifié d’approche fragmentaire en matière de création de catégories spéciales et elle a laissé entendre que, si nous faisons une exception pour les producteurs de fruits et légumes, d’autres groupes se manifesteront et demanderont des exemptions similaires. Elle a également émis des réserves au sujet de la fiducie réputée qui, dans le cadre de ce type de restructuration, pourrait :

[...] entraîner l’épuisement du fonds de roulement d’un acheteur au moment où il en a le plus besoin et empêcher l’acheteur d’obtenir un financement provisoire, ce qui compromettrait la perspective d’une restructuration réussie qui protégerait la valeur de l’entreprise, sauverait des emplois et améliorerait le recouvrement des créanciers.

Je me demande quelle est votre réponse à cette préoccupation.

Le sénateur Cotter : Permettez-moi de répondre d’abord à votre deuxième question. On peut protéger son fonds de roulement en payant ses factures. L’une des factures est celle des producteurs de fruits et légumes qui ont fourni le produit qui permet à l’entreprise de prospérer. Ma sympathie est assez limitée sur ce point.

En ce qui concerne le premier point, je pense que c’est la raison pour laquelle j’ai inclus, de manière quelque peu injustifiée, ce que j’ai appelé la « section 3 », et que j’ai encouragé le Comité des banques à y réfléchir, car votre observation est extrêmement juste et valable.

Nous avons tendance à agir ainsi dans différents domaines au Sénat. Nous travaillons sur des dispositions particulières du Code criminel, et vous et moi au Comité des affaires juridiques participons à ce travail. En agissant de la sorte, nous courons le risque de ne pas être très efficaces et de ne pas réfléchir de façon globale. Ce que nous avons tendance à faire, c’est dire que, jusqu’à ce qu’une initiative globale soit présentée, nous devrions apporter de petites améliorations, et je pense que c’est ce que fait le projet de loi. Toutefois, tout ce domaine exige une réflexion d’intérêt public pour déterminer qui a besoin d’une meilleure protection et qui est plus vulnérable dans ce genre de circonstances.

Je ne sais pas si je suis un capitaliste, mais je respecte les marchés, y compris les marchés boursiers. Je respecte le besoin des gens qui font des investissements financiers d’essayer d’avoir une protection pour leur argent. Toutefois, les conséquences pour les personnes les plus vulnérables — et il s’agit des personnes les plus vulnérables dans ce contexte particulier — sont graves, et nous devrions travailler fort afin d’y remédier, sénatrice Simons. J’espère que, au-delà de ce projet de loi et du travail que nous avons fait en ce qui concerne les pensions, nous allons examiner de manière plus approfondie et exhaustive les avantages et les inconvénients pour prendre des décisions en fonction de nos constatations. Je vous remercie.

L’honorable Yuen Pau Woo : Le sénateur Cotter accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Cotter : Certainement.

Le sénateur Woo : Sénateur Cotter, pourriez-vous nous dire ce que vous pensez du mérite relatif des autres outils de protection pour ces producteurs, comme l’assurance ou l’affacturage pour les comptes débiteurs, ce qui atténuerait les risques pour l’acheteur du produit en les dirigeant vers une tierce partie?

Le sénateur Cotter : Sénateur Woo, je pense que vos connaissances sur les divers outils dont dispose un vendeur dans ce contexte sont beaucoup plus approfondies que les miennes. Essentiellement, les producteurs sont encouragés à dépenser de l’argent pour s’assurer eux-mêmes contre le risque de ne pas être payés. C’est une proposition assez juste. En fait, c’est en quelque sorte ce que nous demandons aux institutions financières quand elles doivent mesurer le risque.

(1740)

C’est beaucoup plus difficile si vous êtes un petit producteur, car vous n’avez pas vraiment accès aux renseignements nécessaires pour savoir quel type de risque vous prenez, parce que vous ne savez peut-être pas grand-chose de la viabilité de la personne à qui vous vendez le produit. J’utilise l’exemple simpliste de la petite‑fille qui voulait connaître l’état de la société pour laquelle elle allait travailler à temps partiel. Ce n’est pas tout à fait la même chose pour les producteurs de fruits et légumes, et certains d’entre eux ont des activités très importantes. Je pense qu’il est plus difficile pour eux de favoriser et de mettre en œuvre ce type de mesures de gestion des risques. Vous le savez mieux que moi. J’aurais souhaité que la sénatrice Robinson ait à répondre à cette question.

C’est un point légitime, mais je ne pense pas que cela règle le problème pour un grand nombre de fournisseurs dans cette situation.

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

Affaires étrangères et commerce international

Motion tendant à autoriser le comité à étudier la situation au Liban—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Housakos, appuyée par l’honorable sénateur Smith,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, la situation au Liban et à déterminer si un envoyé spécial devrait être nommé, dès que le comité sera formé, le cas échéant;

Que le comité soumette son rapport final au plus tard le 28 février 2022.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat, je voudrais demander l’ajournement au nom du sénateur Housakos pour le reste de son temps de parole.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Peuples autochtones

Adoption de la motion tendant à autoriser le comité à étudier la politique fédérale sur les revendications particulières et le processus connexe

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Francis, appuyée par l’honorable sénateur Klyne,

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à étudier la politique fédérale sur les revendications particulières et le processus connexe, et à en faire rapport, y compris, sans toutefois s’y limiter :

a)les recherches relatives aux revendications particulières et leur élaboration;

b)le règlement des revendications particulières, notamment les indemnisations et l’accès à la médiation;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 30 octobre 2025;

Que le comité conserve les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer ses rapports auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Peuples autochtones

Autorisation au comité d’étudier les dispositions et l’application de la Loi sur les langues autochtones

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Francis, appuyée par l’honorable sénateur Klyne,

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les dispositions et l’application de la Loi sur les langues autochtones (L.C. 2019, ch. 23) conformément à l’article 49.1 de ladite loi;

Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 31 décembre 2025;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat;

Que le comité conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Le centième anniversaire de la Loi d’exclusion des Chinois

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Woo, attirant l’attention du Sénat sur le 100e anniversaire de la Loi d’exclusion des Chinois, sur les contributions que les Canadiens d’origine chinoise ont apportées à notre pays et sur la nécessité de combattre les formes contemporaines d’exclusion et de discrimination auxquelles sont confrontés les Canadiens d’origine asiatique.

L’honorable Yuen Pau Woo : Votre Honneur, six mois se sont écoulés depuis la dernière intervention à propos de cette interpellation. Je souhaite exercer mon droit de dernière réplique.

Son Honneur la Présidente : J’informe le Sénat que, si l’honorable sénateur Woo prend la parole maintenant, son intervention aura pour effet de clore le débat sur cette interpellation.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Finances nationales

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur toute question concernant les prévisions budgétaires du gouvernement en général et d’autres questions financières

L’honorable Percy Mockler, conformément au préavis donné le 20 mars 2024, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le mardi 29 mars 2022, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des finances nationales concernant son étude sur toute question concernant les prévisions budgétaires du gouvernement en général et d’autres questions financières, tel que précisé à l’article 12-7(7) du Règlement, soit reportée du 14 avril 2024 au 31 décembre 2025.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(À 17 h 47, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

Annexe - Liste des sénateurs

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